Intervention de Christian Gaudin

Réunion du 10 juin 2009 à 14h30
Crise de l'industrie — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Christian GaudinChristian Gaudin :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la crise qui touche actuellement notre industrie est grave. Les chiffres de l’INSEE publiés aujourd’hui l’attestent : en un an, la production industrielle a chuté de 13, 8 % et de 16, 5 % pour la seule production manufacturière.

Au mois d’avril 2009, la production de l’industrie manufacturière se tasse à nouveau de moins 0, 5 %, après un net recul déjà enregistré en mars. Pour l’ensemble de l’industrie, la baisse de la production se poursuit également.

Concrètement, les carnets de commandes de nombreuses entreprises se vident, les assureurs crédit se désengagent de plus en plus. Les défaillances d’entreprises et les destructions d’emploi sont en hausse.

Cela a été dit, certains secteurs – notamment l’automobile, le textile, la chimie – sont plus touchés que d’autres. La crise actuelle a cela d’alarmant qu’elle frappe la quasi-totalité des secteurs industriels.

L’enjeu économique est important : l’industrie manufacturière représente 14 % de la valeur ajoutée et occupe 15 % de la population active. En tenant compte du développement de l’emploi temporaire et de l’externalisation de certaines activités, l’emploi industriel équivaut à près de 40 % de l’emploi total.

Nous savons que l’industrie française se caractérise par la présence très importante des PME-PMI, qui représentent près de 90 % des entreprises de ce secteur, 39 % de l’emploi et 30 % de la valeur ajoutée.

En ce sens, il faut souligner qu’aider nos PME, c’est doper notre économie. De nombreuses mesures ont été prises dans ce but. Hier, nous adoptions la dernière en date : la proposition de loi tendant à favoriser l’accès au crédit des petites et moyennes entreprises. Pour soutenir efficacement et rapidement nos PME, la proposition de loi de notre collègue Jean Arthuis, président de la commission des finances, visant à renforcer l’efficacité de la réduction d’impôt de solidarité sur la fortune au profit de la consolidation du capital des petites et moyennes entreprises, que nous examinerons prochainement, me paraît tout à fait opportune.

En effet, elle participe à un objectif stratégique de première importance : les PME et les entreprises de taille intermédiaire sont au cœur de la croissance économique et de l’emploi. Il faut avoir pour ambition de contribuer à l’émergence d’entreprises de plus grande taille en accompagnant et en finançant en priorité les projets innovants.

Aujourd’hui, trop peu d’entreprises industrielles atteignent ce seuil critique. La comparaison avec la situation de notre principal partenaire est édifiante : au niveau des PME industrielles de 20 salariés et plus, on compte en moyenne 170 salariés par entreprise en Allemagne, contre seulement 120 en France.

Je ferai le même constat en ce qui concerne le commerce extérieur : en 2006, en « temps normal », pourrait-on dire, l’Allemagne exportait 786 milliards d’euros de produits manufacturés, soit deux fois plus que la France, avec 318 milliards d’euros. M. de Montesquiou a déjà pris cette comparaison.

Nous savons que pour sauvegarder nos industries, pour améliorer leur compétitivité, la clé, la seule solution durable réside dans l’innovation. Plus précisément et concrètement, il est capital d’encourager le transfert de la connaissance issue de la recherche vers l’innovation industrielle, d’encourager le rapprochement entre recherche publique et entreprises privées, et d’encourager la recherche privée au sein des entreprises.

Certains dispositifs déjà mis en œuvre présentent des caractéristiques intéressantes qui doivent inspirer nos efforts.

Je commencerai par le soutien d’OSEO à l’innovation. Avec l’intégration de l’Agence de l’innovation industrielle en janvier 2008, un nouveau programme national d’innovation stratégique industrielle a été mis en place. Il offre un soutien aux entreprises non seulement pour financer leurs programmes de recherche et développement, mais aussi pour développer la phase d’industrialisation et de mise en marché des innovations industrielles. Cet accompagnement de l’entreprise durant tout le cycle de production est d’importance.

Autre dispositif, le crédit d’impôt recherche a vu sa dotation considérablement augmentée dans la loi de finances pour 2009. Cette mesure fiscale de soutien aux dépenses de recherche et développement permet un allégement du coût de la recherche et développement par une prise en compte de 30 % de cet investissement. Sa particularité tient au fait qu’il est favorable aux petites entreprises.

Déjà, en 2006, les PME indépendantes bénéficiaient de 25 % des crédits d’impôt recherche, alors qu’elles ne représentaient que 13, 5 % des dépenses de recherche et développement déclarées.

En tant que rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission « Recherche et enseignement supérieur », je conduis, depuis quelques semaines, un rapport d’évaluation budgétaire sur le crédit d’impôt recherche. L’objet de cette mission est de mesurer son utilisation, son effet de levier, sa capacité à rapprocher l’entreprise du monde de la recherche et cela, de la PME à la multinationale implantée sur notre territoire. Ce dispositif est, faut-il le rappeler, en pleine cohérence avec la politique des pôles de compétitivité.

L’Union européenne, l’État, les collectivités doivent soutenir l’innovation : l’avenir de notre industrie en dépend. Ce soutien, qui s’impose maintenant tant la situation est urgente, doit accorder une place particulière à nos PME. J’ajouterai qu’il doit permettre de développer non seulement les industries à forte valeur ajoutée mais aussi, et cela doit aller de pair, les industries d’avenir.

La période durant laquelle l’industrie se développait au détriment de notre environnement est révolue. Elle devra, demain, participer à la réduction des dégâts causés par l’exploitation irraisonnée de nos ressources. L’engagement national pour l’environnement en prend acte : notre activité industrielle de demain devra intégrer la préoccupation environnementale, mais aussi s’intéresser aux nouveaux marchés qui s’ouvrent.

En période de crise, monsieur le secrétaire d’État, la pertinence des choix s’impose, d’autant plus pointue que la marge d’action se réduit. Il nous faut aujourd’hui privilégier l’innovation dans nos entreprises, car c’est ainsi que nous préparerons le retour à la croissance.

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