Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du projet de loi de finances pour 2005 dévolus au tourisme affichent une légère progression de 3, 5 % qui ne rend pas compte de la réalité, à savoir la baisse sensible des moyens accordés à la politique du tourisme.
En effet, l'augmentation de la dotation dévolue au tourisme en 2005 s'explique essentiellement, d'une part, par les frais du déménagement de la direction du tourisme et, d'autre part, par le transfert des crédits de rémunération des agents en poste à la direction du tourisme qui étaient jusqu'alors rémunérés par la section « services communs », et ce afin de satisfaire aux dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la LOLF.
En réalité, la baisse des crédits du tourisme amorcée l'année dernière se poursuit sensiblement, en dépit de la réunion récente de deux comités interministériels sur le tourisme ayant affiché haut et fort l'attachement porté par le Gouvernement au développement d'une politique ambitieuse du tourisme.
Il est vrai que les enjeux économiques sont élevés. La France, première destination touristique au monde avec 75 millions de visiteurs étrangers en 2003, a connu ces six dernières années une croissance touristique particulièrement exceptionnelle : entre 1997 et 2003, le nombre de visiteurs étrangers est passé de 67, 3 millions à 75 millions et, dans la même période, l'excédent du poste « voyage » de la balance des paiements passait de 8, 3 milliards d'euros à 15, 1 milliards d'euros.
L'industrie touristique génère deux millions d'emplois directs ou indirects, répartis dans 200 000 entreprises, essentiellement petites ou moyennes. En 2003, la consommation touristique en France a été estimée à 102, 4 milliards d'euros contre 97, 1 milliards d'euros en 2001. L'Organisation mondiale du tourisme prévoit, dans les vingt ans à venir, le triplement des flux touristiques internationaux et leur doublement en Europe. D'ici à 2005 ou à 2006, la France devrait notamment recevoir un million de visiteurs supplémentaires en provenance de la Chine.
L'importance des enjeux justifie, on le voit, une politique du tourisme qui permette de consolider et de renforcer l'attractivité de notre pays, dans un contexte concurrentiel accru par l'ouverture politique de certains pays comme la Chine, le continent sud-américain et probablement, dans les années à venir, les pays baltes ou les ex-républiques soviétiques.
L'instrument qui doit permettre d'assurer la compétitivité de la France est Maison de la France, dont la mission essentielle consiste à « mettre en oeuvre des actions d'information et de promotion relatives à l'image, aux produits et à l'ingénierie touristique de métropole et d'outre-mer sur les marchés français et étrangers, ainsi qu'à mettre en oeuvre les opérations d'information touristiques à destination du public français ».
Le comité interministériel sur le tourisme du 23 juillet 2004 s'est attaché à développer une stratégie marketing pour les années 2005 à 2010. L'objectif est d'assurer à la France un positionnement nouveau en tant que destination touristique, notamment à partir de l'étude des caractéristiques des différents marchés émetteurs de touristes. Afin d'assurer la mise en place de cette stratégie, il est important de doter le groupement d'intérêt économique, GIE, de ressources stables. Trop de gels et d'annulations de crédits perturbent le bon fonctionnement de Maison de la France. Pour agir dans la durée, le GIE doit pouvoir anticiper sur des ressources réelles.
Toujours dans l'objectif de conserver à la France sa place de première destination touristique mondiale, le comité interministériel sur le tourisme du 9 septembre 2003 a décidé de la mise en place d'un plan qualité France, qui doit conduire notamment à la réalisation d'un référentiel national de qualité comprenant une centaine d'engagements. Un Comité national de l'offre touristique a été mis en place, afin de définir ce référentiel et les conditions de l'attribution de la marque, mais aussi de créer un logotype et une charte graphique qui doivent permettre à Maison de la France d'en assurer la promotion, en partenariat avec les fédérations professionnelles.
Les enjeux sociaux ne comptent pas moins que les enjeux économiques et sont pourtant délaissés depuis deux ans. Présentée comme la troisième priorité de ce projet de budget, la politique sociale du tourisme, destinée à favoriser l'accès aux vacances pour tous, sera en effet affectée par une réduction importante de moyens en 2005.
La dotation de la politique d'accès aux vacances pour tous, après avoir diminué de 16 % en 2004, régresse de nouveau de 20 % cette année. Quant à l'ambitieux programme de consolidation des hébergements de tourisme social, qui a pris le relais du plan d'aide à la rénovation du patrimoine associatif, après avoir vu ses dotations régresser fortement en 2004, il a été privé, dans un premier temps, de la quasi-totalité des crédits. Face aux réactions que cette décision a suscitées, vous avez, monsieur le ministre, obtenu que ceux-ci soient rétablis dans la loi de finances rectificative pour 2003.
La politique sociale du tourisme se justifie pourtant pleinement. Chaque année, hélas ! la présentation du budget du tourisme est l'occasion de rappeler que 40 % de nos concitoyens ne partent jamais en vacances.
L'année 2005 sera importante pour le tourisme à plusieurs titres. L'année prochaine, afin de se conformer aux dispositions de l'article 7 de la LOLF, l'intégralité des crédits de l'actuelle « section tourisme » sera rassemblée au sein du « programme tourisme », lui-même inclus dans la mission interministérielle « politique des territoires ».
Trois actions composeront le programme « tourisme ».
La première action, « promotion de l'image touristique de la France et de ses savoir-faire », a pour objectif de maintenir la place de la France en tant que première destination touristique mondiale en assurant, d'une part, la promotion de la destination « France » sur les marchés étrangers et français et, d'autre part, la promotion des savoir-faire français à l'étranger et en France.
La seconde action, « économie du tourisme », a pour objet de réguler l'activité touristique et de structurer l'offre, en assurant la connaissance préalable de la réalité et de l'évolution économiques du secteur, en réglementant le secteur et en agissant sur la normalisation, en soutenant les filières et les métiers dans leurs actions d'amélioration de la qualité, en développant l'ingénierie, mais aussi l'expertise, et en renforçant l'attractivité des territoires.
La troisième action, « accès aux vacances », vise à favoriser l'adaptation de l'offre, afin de faciliter le départ en vacances de tous les publics, notamment des handicapés, des seniors et des personnes démunies. La politique sociale du tourisme ainsi clairement délimitée, il sera sans doute plus aisé d'en suivre les développements.
Enfin, l'année 2005 sera celle de la fusion de l'Agence française de l'ingénierie touristique, l'AFIT, de l'Observatoire national du tourisme, l'ONT, et du service d'études et d'aménagement de la montagne. Cette fusion, qui permettra d'améliorer la lisibilité des missions de conseil et d'expertise assurées par les organismes ou les services placés auprès du ministère du tourisme, résulte des décisions prises par les comités interministériels sur le tourisme. Le précédent rapporteur des crédits du tourisme, Mme Beaudeau, qui avait réalisé un rapport sur l'AFIT, était parvenu à peu près au même constat. Toutefois, les 70 emplois concernés doivent être préservés.
Voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les principales observations que m'inspire ce projet de budget du tourisme, dont la commission des finances a décidé de proposer l'adoption.