Intervention de Roger Karoutchi

Réunion du 9 décembre 2004 à 21h30
Loi de finances pour 2005 — Iv. - logement

Photo de Roger KaroutchiRoger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la section « logement » du projet de budget du travail, de la santé et de la cohésion sociale s'élèvent, dans le projet de loi de finances initiale pour 2005, à 6, 5 milliards d'euros.

En première analyse, ces crédits sont en baisse de 1, 5 %. Toutefois, cette baisse est due à des mesures affectant le périmètre du budget du logement dans quatre domaines : la participation de l'Etat aux fonds de solidarité pour le logement, le FSL ; l'aide aux associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées ; le financement de l'aide personnalisée au logement, l'APL ; enfin, le mode de financement du prêt à taux zéro, le PTZ, qui est modifié.

Le financement du prêt à taux zéro sera en effet assuré, si l'article 67 du projet de loi de finances pour 2005 est adopté en l'état, non plus au moyen d'une subvention versée sur crédits budgétaires, mais grâce à un crédit d'impôt.

A structure constante, le budget de la section « logement » augmente de 227 millions d'euros en 2005, soit de 3, 4 %. L'évolution est même de 8, 3 % hors crédits du prêt à taux zéro.

Cette évolution traduit la priorité donnée par le Gouvernement au logement, qui constitue l'un des trois piliers du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

Ma première observation portera sur la mise en oeuvre de ce dernier.

Le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale comporte deux volets principaux dans le domaine du logement.

En matière de logement locatif social, je rappelle les objectifs, qui sont très ambitieux : il s'agit de doubler, en cinq ans, le nombre de nouveaux logements sociaux réalisés chaque année, en passant d'un peu moins de 60 000 à 120 000, politique de la ville comprise.

Le projet de loi de finances pour 2005 reflète les engagements pris dans le plan et dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, en portant les crédits de paiement consacrés aux subventions d'investissement en faveur du locatif social et au renouvellement urbain, hors politique de la ville, à 465 millions d'euros, en hausse de 61 %. Les autorisations de programme s'élèvent à 442 millions d'euros, soit une augmentation de 22 %.

La commission des finances approuve pleinement les objectifs du volet « logement locatif social » du projet de loi de programmation, mais elle souhaite néanmoins souligner quelques points.

D'une part, les crédits consacrés au logement locatif social, hors politique de la ville, augmentent de manière considérable.

D'autre part, pour les crédits affectés à l'ANRU, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, qui vient de faire l'objet d'un long débat, ce qui me dispense de m'y attarder, l'objectif semble respecté, grâce, il est vrai, à un abondement du fonds de renouvellement urbain, soit 50 millions d'euros prévus par la loi de finances rectificative de 2003 auxquels s'ajoutent 100 millions d'euros prévus par la loi de finances rectificative de 2004.

Cependant, la réalisation des engagements pris dépendra aussi - vous le disiez tout à l'heure, monsieur le ministre - du degré d'implication des collectivités locales, puisque la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit la possibilité pour l'Etat de déléguer ses compétences en matière de financement des aides à la pierre.

L'article 42 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, qui prévoit la prise en compte des objectifs de la programmation dans les conventions de délégation de compétence, doit être compris comme un dispositif plus incitatif que réellement normatif.

S'agissant maintenant de la mobilisation du parc privé, le plan de cohésion sociale prévoit une augmentation des crédits de l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, afin de financer, sur cinq ans, 200 000 logements à loyers maîtrisés ainsi que la remise sur le marché de 100 000 logements vacants.

Je note toutefois, comme l'avait fait notre collègue Paul Girod, rapporteur pour avis sur le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, que les crédits prévus en faveur de la « mobilisation du parc privé » ne sont pas en totalité des crédits supplémentaires alloués à l'ANAH.

En crédits de paiement, en effet, l'ANAH ne bénéficiera que de 19 millions d'euros supplémentaires au lieu des 70 millions d'euros annoncés par le projet de loi de programmation. Vous nous avez néanmoins assuré, monsieur le ministre, qu'il y aurait bien 70 millions d'euros « sanctuarisés » en 2005 pour l'application de la loi.

J'en viens à mon second point, qui concerne la relance de l'accession à la propriété.

Le Gouvernement a engagé une politique de relance de l'accession, en partant du constat que 57 % seulement des Français sont propriétaires de leur résidence principale. La relance de l'accession à la propriété passe tout d'abord par une refonte du prêt à taux zéro.

Il s'agit en effet de transformer un coût budgétaire, de l'ordre de 550 millions d'euros par an, en une dépense fiscale, c'est-à-dire de transformer une subvention en un crédit d'impôt sur les sociétés accordé aux banques qui distribueront le prêt à taux zéro. Le crédit d'impôt sera versé, en l'état du texte adopté à l'Assemblée nationale, sur cinq ans et non plus sur sept ans.

Surtout, le PTZ sera élargi afin de le rendre « plus social », « plus familial » et de l'ouvrir à l'acquisition dans l'ancien. Le montant maximum du prêt et les plafonds d'éligibilité seront revalorisés pour la première fois, mes chers collègues, depuis la création du dispositif en 1995. La non-actualisation des plafonds de revenus avait en effet réduit, année après année, l'efficacité du PTZ. Par ailleurs, l'avantage lié au différé d'amortissement sera totalement préservé.

L'objectif du Gouvernement est de faire passer le nombre de prêts d'environ 100 000 aujourd'hui à 240 000, avec ce qu'il est convenu d'appeler le « PTZ plus », pour un coût budgétaire qui passerait, je l'ai dit, de 550 millions d'euros à 1, 4 milliard d'euros par an dans cinq ans.

Eu égard à ce coût, le Gouvernement a jugé indispensable de transformer le mécanisme pour en faire une dépense fiscale, mais, je le souligne, ce nouveau rouage budgétaire ne doit rien changer dans la pratique pour les ménages.

S'agissant de la relance de l'accession à la propriété, deux autres points doivent être mentionnés.

Tout d'abord, le mécanisme de la location-accession, institué par une loi de 1984, est relancé grâce au PSLA, le prêt social de location-accession, mis en place par un décret du 26 mars 2004.

Enfin, le 4 février 2004, M. Gilles de Robien, alors ministre en charge du logement, avait annoncé la mise en place d'une ambitieuse politique en faveur de l'accession sociale à la propriété : à cette fin, le projet de loi dit alors de « propriété pour tous » et requalifié depuis « habitat pour tous » devrait être présenté en 2005. Il complétera le volet « logement » du projet de loi de cohésion sociale.

Nous avons déjà pris connaissances de certaines de ses dispositions dans la presse, mais il serait d'ailleurs intéressant, monsieur le ministre, que vous nous précisiez vos intentions s'agissant de ce projet de loi, notamment en ce qui concerne la question de l'accession à la propriété et celle de la mobilisation du foncier en faveur de l'habitat, question très importante, surtout pour un Francilien comme moi.

Enfin, et ce sera ma dernière observation, on peut estimer, s'agissant de la mise en oeuvre de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, que le budget du logement est sur de « bons rails ».

En effet, suivant en cela une préconisation de la commission des finances, le Gouvernement a choisi de regrouper la ville et le logement au sein d'une même mission, ce qui est beaucoup plus satisfaisant que la présentation initialement retenue.

Les crédits du budget du logement seront regroupés au sein de deux programmes distinguant aides à la pierre et aides à la personne, ce qui correspond là encore à une préconisation formulée, voilà quelques mois, par la commission des finances.

Cette structure lisible a facilité la double présentation des crédits et la mise en place de l'avant-projet annuel de performance. Celui-ci énonce des objectifs et des indicateurs qui paraissent pertinents.

Je tiens néanmoins, monsieur le ministre, à souligner l'hétérogénéité des indicateurs, dont certains correspondent à des données statistiques déjà existantes tandis que d'autres sont en construction ou relèvent même du sondage plutôt que de la statistique. Il faudra que le ministère explicite la construction des indicateurs afin que le Parlement puisse les analyser pour ce qu'ils sont exactement.

En outre, ces indicateurs sont souvent des indicateurs d'activité et non des ratios entre coût et efficacité. L'analyse des indicateurs devra en tenir compte et rapporter les résultats au coût des politiques menées.

En définitive, ce projet de budget témoigne bien de la priorité que le Gouvernement accorde au logement, dans un contexte budgétaire difficile. Des efforts importants sont réalisés tant en matière de relance du secteur locatif social qu'en matière d'incitation à l'accession à la propriété, ce qui conduit la commission des finances à proposer l'adoption des crédits du logement.

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