Intervention de Gérard Delfau

Réunion du 9 décembre 2004 à 21h30
Loi de finances pour 2005 — Iv. - logement

Photo de Gérard DelfauGérard Delfau :

S'agissant du budget du logement, monsieur le ministre, je serai moins sévère que je ne l'ai été à propos de celui de la ville.

Certes, ici encore, nous constatons la même fâcheuse aptitude à reporter au-delà de l'année 2005 une partie importante du coût des mesures proposées et, ce faisant, à hypothéquer l'avenir.

Mais nous reconnaissons à ce projet de budget une nette augmentation des crédits, une ambition très louable de doublement des constructions de logements sociaux, un traitement équilibré de toutes les formes d'accès à l'habitat, le maintien, et même l'extension à l'ancien du prêt à taux zéro, avec un élargissement du critère familial.

Cette dernière mesure a été sauvée in extremis grâce à la mobilisation des élus de toutes tendances. Elle est aujourd'hui confortée, ce dont je me réjouis. Prenons garde pourtant, monsieur le ministre, que le passage d'une formule à l'autre en février se fasse sans rupture. Je sais que vous y travaillez avec les établissements financiers des opérateurs du logement, et nous vous souhaitons un total succès.

Heureuse aussi est la hausse de la dotation du projet de loi de finances qui s'adresse aux catégories sociales intermédiaires dont le niveau de ressources empêche aussi bien l'accès au logement social classique qu'à l'accession à la propriété.

Bienvenu enfin est le relèvement du budget de l'ANAH, dont les crédits avaient, il est vrai, beaucoup diminué au cours de ces deux dernières années. Cette agence joue un rôle important dans la rénovation de l'habitat ancien et la mise en location de logements inoccupés.

En revanche, je suis sceptique sur la capacité de financement du doublement du parc locatif social, même si l'objectif est en soi nécessaire. En effet, l'essentiel de l'effort repose sur les organismes d'HLM et sur les collectivités territoriales, à un moment où celles-ci se voient chargées de nouvelles compétences, sans transfert de ressources correspondantes.

J'ai, en septembre dernier, comme certains de mes collègues ici, assisté, à Montpellier, au congrès de l'Union nationale des offices d'HLM. J'ai entendu ses dirigeants exprimer la crainte de ne pouvoir honorer ce contrat. J'ai participé, en novembre dernier, au congrès des maires où les élus ont exprimé la même inquiétude.

Disant cela, je veux seulement souligner que l'engagement de l'Etat, qui est déjà réel, devra sans doute être accru dans les années qui viennent si l'on veut tenir ce pari. Ce serait d'ailleurs justifié, car le logement doit demeurer une grande cause nationale et doit rester de la compétence non exclusive mais principale de l'Etat.

Je voudrais élargir maintenant le débat et parler crûment du scandale de la spéculation sur le foncier et sur le bâti, sans oublier l'envolée des loyers. Ce sont autant de réalités que l'on constate dans les grandes villes et dans un certain nombre de régions du sud de la France, tout particulièrement - mais pas seulement - en Languedoc-Roussillon.

Il s'agit de ce que j'ai l'habitude d'appeler un enrichissement sans cause, qui pèse sur les individus et les familles, mais aussi sur les collectivités territoriales, sans que ces dernières puissent l'infléchir.

C'est un mécanisme d'exclusion impitoyable, devant lequel nous sommes démunis. Concrètement, que puis-je répondre à mes concitoyens qui, devant cette situation, s'inquiètent et se demandent où iront vivre leurs enfants ? Que répondre aux maires de nos communes qui ont vu le prix du foncier multiplié par six en quatre ou cinq années et qui constatent qu'ils n'ont pas les moyens de freiner cette spéculation ?

Sans doute, et c'est une suggestion, le moment est-il venu, monsieur le ministre, de mettre en place, sous votre autorité, un groupe de travail, pour examiner les mécanismes de lutte contre la spéculation.

Il conviendrait aussi d'imaginer un prélèvement d'une partie de la plus-value afin de financer les budgets du logement et de l'urbanisme sur l'initiative des collectivités. Des exemples existent en Europe, notamment aux Pays-Bas. Ne pourriez-vous vous engager dans cette voie ? Il y a urgence à cet égard.

Monsieur le ministre, contrairement aux budgets précédents, ce projet de budget pour 2005 me paraît intéressant sous un certain nombre d'aspects, même si - et je reconnais que vous n'en êtes pas responsable - il est loin de répondre à l'aggravation trop rapide de la situation du logement dans un certain nombre de régions, notamment dans celle où je vis.

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