Dans ces conditions, on comprend qu'il soit parfois tentant pour certaines collectivités d'augmenter un peu, beaucoup -passionnément même ! - leurs impôts locaux, puisque ce ne sont pas toujours leurs contribuables qui en supporteront les conséquences !
C'est un sujet qui est devenu majeur, compte tenu des augmentations d'impôt spectaculaires décidées par certaines régions, sinon par la quasi-totalité d'entre elles. Dès lors, une réflexion plus globale s'impose afin de créer les conditions permettant à chacun d'assumer ses responsabilités.
Comme vous le savez, j'avais lancé, en juin dernier, un audit sur les dégrèvements d'impôts locaux. Cette mission, qui vient de me rendre ses conclusions, formule plusieurs pistes intéressantes.
La première consiste à rendre disponibles des tableaux de bord départementaux présentant pour chaque dispositif le montant du dégrèvement rapporté au produit de l'impôt.
La deuxième envisage de créer un compte fiscal dématérialisé de chaque collectivité, où apparaîtrait l'ensemble des informations relatives aux flux financiers entre l'État et les collectivités, afin de savoir ce que chaque collectivité paie et combien elle reçoit de l'État.
La troisième, enfin, tend à enrichir et à clarifier la feuille d'imposition du contribuable local, sujet qui mériterait sans nul doute d'être travaillé.
L'efficacité économique et l'amélioration du cadre d'exercice des responsabilités de chacun sont donc les deux premiers chantiers qu'il nous faudra poursuivre dans les mois à venir.
Enfin, troisième point essentiel, tous ces chantiers n'ont de sens que si l'on mène parallèlement un travail de fond sur le périmètre et le mode de financement de la dépense publique.
Notre pays devra relever trois défis majeurs, dont le premier, et le plus important, est celui de la « soutenabilité » financière. Si l'on n'y répond pas, la viabilité même de notre système sera menacée.
Le deuxième défi est celui du vieillissement démographique. Ce dernier suscitera des besoins de financement croissants en matière de santé, de dépendance, de retraite et de handicap. L'enjeu est financier, mais aussi social, avec un risque de conflit entre les générations. C'est un point qui nous invite à une réflexion courageuse dès à présent.
Enfin, le troisième défi a trait à la montée globale des nouveaux risques, notamment le changement climatique, les épidémies, le terrorisme, la transformation des parcours professionnels, l'évolution des structures familiales. Ce sont autant de sujets sur lesquels nous avons, nous, une exigence de réponse et d'anticipation pour l'avenir.
Pour sortir par le haut de ces défis, non seulement il faudra que chacun joue le jeu et assume ses responsabilités, mais il sera surtout nécessaire d'engager une démarche profonde de modernisation.
À cet égard, l'on doit se poser deux questions.
La première est de savoir s'il est possible de maîtriser la dynamique de la dépense publique.
Certes, le débat est infini dans ce domaine, mais je réponds d'emblée « oui » à cette question. Ce faisant, je ne m'exprime pas uniquement en tant que ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, car si je n'avais plus cette qualité, ou si j'occupais d'autres fonctions, ma réponse serait la même.
En effet, pendant longtemps, on a trompé les Français. On leur a fait croire, d'abord, que la ligne de partage se situait entre ceux qui dépensaient plus - les gentils - et ceux qui dépensaient moins - les méchants !
On leur a fait également croire que l'administration fonctionnait moins bien si l'on n'augmentait pas sans cesse le nombre des fonctionnaires.
Enfin, on a refusé de poser la seule bonne question : la dépense publique que j'engage est-elle efficace ? Est-elle correctement évaluée ? Pourrait-elle être mieux utilisée ?