Non seulement ce n'est pas très sain, mais cela ne simplifie pas le système ! En outre, cela représente 3 milliards d'euros non compensés !
On remarque également une politique générale d'exonérations sur les bas salaires avec, comme objectif, la réduction du coût relatif du travail des salariés les moins qualifiés. Grâce à cette mesure, le coût global du travail non qualifié au niveau du SMIC dans notre pays s'est rapproché de celui des autres pays de l'Union européenne.
L'enjeu financier de cette politique est lourd, car les allégements généraux - cela a été dénoncé par les orateurs qui m'ont précédé à cette tribune - représentent une masse proche de 20 milliards d'euros. L'affectation, l'année dernière, de recettes à la sécurité sociale pour en assurer le financement semble montrer que l'on souhaite leur donner un caractère pérenne. D'ailleurs, la décision prise cette année de prolonger le dispositif en supprimant totalement les cotisations patronales au niveau du SMIC pour les entreprises de moins de vingt salariés est une nouvelle preuve du choix d'axer la politique de l'emploi dans cette direction.
L'ampleur de ces allégements a ainsi transformé notre système dégressif de cotisations sociales plafonnées en un système partiellement progressif.
Ces observations sur la situation actuelle des prélèvements sociaux, comme sur leur évolution, me conduisent à vous proposer plusieurs réflexions.
La première a trait aux exonérations de charges. Vous le savez, ces allégements doivent être compensés par l'État. C'est une obligation depuis la loi Veil de 1994. Il s'agit en effet d'appliquer un principe simple : la sécurité sociale ne doit pas financer la politique de l'emploi, ni toute autre politique d'ailleurs. C'est donc à l'État de prendre ses responsabilités, ce qui signifie qu'il doit combler le manque à gagner résultant, pour la sécurité sociale, de sa politique d'allégement de charges.
Que l'on ne soit pas satisfait de ce système, je veux bien en convenir. Il faudra alors faire un choix et dire que l'on accepte, pour le budget de la sécurité sociale, une nouvelle recette pérenne dont la dynamique sera équivalente à celle des dépenses dont nous avons tout fait pour maîtriser l'évolution, même si un tel exercice n'est pas facile.
Il faut reconnaître que l'État ne compense que très imparfaitement les exonérations de charges ciblées. Le manque à gagner est, je l'ai dit, de 3 milliards d'euros. Des menaces importantes pèsent sur les allégements généraux à partir de 2007 et pour les années suivantes, surtout si les propositions d'augmentation rapide et forte du SMIC, entendues ici et là, devaient voir le jour ; la situation, loin de s'améliorer, ne ferait alors bien évidemment qu'empirer ! Les menaces seront plus grandes encore si l'on s'oriente vers une banalisation des exonérations en les « barémisant », c'est-à-dire en les intégrant directement dans le barème des cotisations sociales. Ce point a été abordé par M. le rapporteur général.
Une telle mesure serait à mon avis rapidement pénalisante pour la sécurité sociale, car elle risquerait de figer les masses budgétaires. Elle serait aussi d'une grande lourdeur technique, car elle nécessiterait la modification des logiciels de paie des entreprises afin de prendre en compte la situation individuelle de chaque salarié rémunéré jusqu'à 1, 6 fois le SMIC.