C'est sans doute vrai pour un nombre extrêmement restreint de personnes qui sont actuellement sur le fil du rasoir.
Auparavant, une certaine précarité prévalait. Les contrats à durée déterminée se succédaient, mais ils étaient tout de même renouvelés, parfois même - des exemples ont été donnés ce soir, et je reconnais qu'une telle situation est anormale - pendant dix-huit années !
Toutefois, dans le cadre du système que vous préconisez, un agent pourra être remercié après un ou deux contrats dont la durée cumulée pourra atteindre six ans, alors qu'il aurait pu devenir fonctionnaire. Avec ce projet de loi, vous donnez aux collectivités territoriales, à l'Etat et aux hôpitaux des outils de licenciement et vous leur permettez de contourner la volonté - qui, j'ose l'espérer, est la vôtre ce soir - de pérenniser l'emploi en cause.
Et vous savez fort bien que de tels contournements se pratiquent dans la fonction publique d'Etat, compte tenu des difficultés budgétaires qu'elle connaît ! Il lui est en effet possible d'embaucher des agents non titulaires quand il lui est impossible de recruter des titulaires.
Vous instaurez une précarité de six ans ! Vous dites que ces contrats mettront fin à la précarité, qu'ils faciliteront, pour les agents non titulaires concernés, l'obtention d'un logement ou d'un prêt bancaire. Mais ces agents veulent des contrats à durée indéterminée ! Six ans, ce ne sont pas quelques mois ! Ce n'est pas une année de stage, comme c'est habituellement le cas dans la fonction publique, ce sont six ans de vie, pendant lesquels une collectivité locale pourra accroître la précarité. Six ans ! Tout de même !...
Ce sera mieux pour certains, c'est évident, mais au bout de six ans seulement. Cette disposition n'est donc pas d'une grande générosité.
Ce sera mieux également pour les personnes âgées de plus de cinquante ans, qui pourront, de façon systématique, achever leur carrière avec un peu plus de sécurité. Mais il aurait été préférable, par exemple, de développer la loi Sapin, les concours adaptés, ou la reconnaissance professionnelle.
A ce sujet, Mme le rapporteur ayant indiqué qu'il fallait faire un effort en matière de reconnaissance professionnelle, j'ose espérer qu'un pas sera fait en ce sens lors de l'examen du projet de loi sur la fonction publique territoriale et que des concours adaptés seront organisés. Il reste peu de temps, d'ici à 2006, pour appliquer la loi Sapin ! Peut-être pourra-t-on, d'ailleurs, proroger un certain nombre de ses dispositions.
Pour ma part, je vous ai proposé un certain nombre d'amendements, qui n'ont malheureusement pas été retenus. Cela m'a fait beaucoup de mal pour les catégories d'agents les plus basses !
Peut-être ce projet de loi ne sera-t-il pas examiné en seconde lecture, peut-être l'Assemblée nationale réagira-t-elle un peu différemment, mais je suis choqué que la représentation nationale, compte tenu du fait que ces catégories d'agents perçoivent le SMIC - leur rémunération a même été inférieure au SMIC à une certaine période -, place les intéressés dans une situation précaire.
Votre projet de loi, monsieur le ministre, n'améliore pas vraiment la situation. Vous fragmentez la fonction publique ; le contrat à durée indéterminée vous paraît une bonne mesure, mais les agents qui seront recrutés en CDI prendront la place de fonctionnaires titulaires et entreront en concurrence avec eux. C'est la vérité !
Et, si le recours à de tels contrats devait être généralisé, je m'interrogerais alors, comme mon collègue Claude Domeizel, sur l'équilibre des caisses de retraite. J'espère donc que les mesures que vous avez évoquées tout à l'heure seront bien mises en place, que le robinet sera véritablement fermé et que le recours à ces contrats ne sera pas généralisé.