Le dispositif fiscal dit « Malraux » consiste à accompagner des opérations de rénovation immobilière réalisées dans des conditions qui préservent la qualité architecturale et esthétique de zones urbaines dégradées. J’insiste sur cette notion, qui était au cœur de la législation d’origine.
Son application est limitée géographiquement, puisqu’il s’applique, d’une part, dans les secteurs sauvegardés, qui sont au nombre de quatre-vingt-quinze et sont répartis dans quatre-vingt-dix villes, et, d’autre part, dans près d’un millier de zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, les ZPPAUP.
Cet avantage fiscal n’est pas, jusqu’à présent, limité dans le temps. Or les opérations de rénovation visées ont par nature, me semble-t-il, vocation à s’achever un jour. Par définition, dès qu’il a été remédié à l’état de dégradation, l’application du régime préférentiel des secteurs sauvegardés et des ZPPAUP au sens de la loi Malraux et des dispositions suivantes devrait cesser.
Il conviendrait donc d’assurer un certain « roulement » des incitations fiscales entre les secteurs sauvegardés et les ZPPAUP et de limiter dans le temps ces opérations. On donnerait ainsi au dispositif Malraux une nouvelle vocation, consistant, au-delà de considérations esthétiques et patrimoniales bien sûr tout à fait légitimes, à favoriser l’éradication de l’habitat indigne et la mixité sociale dans les centres-villes anciens.
Dans cette perspective, notre amendement a pour objet d’éviter de pérenniser inutilement le bénéfice des avantages du dispositif Malraux dans les mêmes secteurs sauvegardés et ZPPAUP. En contrepartie, nous voudrions favoriser l’accélération des travaux de rénovation et une meilleure répartition des aides fiscales sur les territoires qui en ont le plus besoin, en particulier les centres-villes dégradés.
Nous prévoyons ainsi que les avantages fiscaux disparaissent au bout de vingt ans, ce qui correspond raisonnablement à la durée d'une opération de rénovation immobilière. Ce délai courrait à compter de la date de l'acte administratif créant le secteur sauvegardé ou la ZPPAUP.
J’observe, mes chers collègues, que des secteurs sauvegardés ayant été créés à l’époque d’André Malraux ou juste après, dans les années soixante et soixante-dix, sont encore aujourd’hui des véhicules fiscaux !
En outre, je connais des villes où le marché immobilier est à un niveau très élevé, ou du moins l’était jusqu’à ces derniers mois. Toutes les opérations pouvaient se faire, pour un public souvent assez privilégié, sans aucune espèce d’incitation fiscale, sans un euro de dépense fiscale. Néanmoins, on continuait à y monter des opérations de défiscalisation au titre de la loi Malraux, et peut-être même plus souvent que dans d’autres localités où le marché était plus déprimé, par exemple dans un petit centre-ville situé dans une zone rurale, où il n’aurait pas été possible de trouver des investisseurs en l’absence d’incitation fiscale. Il me vient également à l’esprit l’exemple de certaines zones de centre-ville encore très dégradées, dans des secteurs sauvegardés récents.
L’objet de cet amendement est donc de poser la question de la rotation de l’avantage fiscal. En effet, dans notre pays, une fois que l’on est entré dans un dispositif fiscal privilégié, dans une niche, on n’en sort plus ! Qui plus est, on s’organise pour la défendre et l’embellir, d’année en année, avec tous les représentants des corporations qui y ont intérêt.