Ce texte, monsieur le ministre délégué, ne repose pas sur des principes simplistes et réducteurs de déterminismes sociaux qui sous-entendraient que les délinquants et les plus démunis produisent des délinquants. Il n'est pas question de stigmatiser ou d'accuser par anticipation telle ou telle catégorie sociale ou bien tel ou tel quartier sensible.
Ce projet de loi tient compte d'une réalité plus complexe, puisqu'il repose sur des actes concrets et signifiants, ou, plus exactement, sur un premier acte de violence et de délinquance. Ainsi, le rappel à l'ordre auquel pourra procéder le maire, acteur pivot du nouveau dispositif, suppose un acte illégal préalable et bien réel.
C'est bien là l'un des points majeurs du projet de loi. Il a été confirmé par l'Assemblée nationale : le maire devient le pilote de la prévention de la délinquance puisque l'article 1er prévoit que « le maire anime, sur le territoire de la commune, la politique de prévention de la délinquance et en coordonne la mise en oeuvre. ».
Au-delà de cette reconnaissance de la forte montée en puissance, depuis une vingtaine d'années, du rôle des communes en matière de sécurité, ce texte reconnaît clairement le rôle privilégié du maire en matière de cohésion sociale. Au-delà de 10 000 habitants, les conseils locaux de sécurité et de prévention seront obligatoires afin de favoriser le travail en réseau, véritable clef de voûte de la prévention comme le souligne M. le rapporteur. Les députés ont fort justement étendu cette disposition à celles des communes de moins de 10 000 habitants qui comprennent une zone urbaine sensible.
De même, afin de mieux prévenir les attitudes de violence, notamment de violence scolaire, le maire aura la charge de l'aide et de l'orientation des familles en difficulté à travers un conseil pour les droits et les devoirs des familles.
Ce partage des informations entre les professionnels soumis au secret sera rendu possible par l'instauration d'un coordonnateur choisi par le maire parmi les travailleurs sociaux du département et après consultation du président du conseil général. Les travaux parlementaires ont permis de préciser le rôle et la fonction de ce coordonnateur.
Face à la multiplication des acteurs, il faut bien en convenir, l'enjeu de la prévention consiste en grande partie à assurer une meilleure coordination, car le temps passé à s'informer ne doit pas être supérieur à celui qui est réellement consacré à des actions de prévention de la délinquance, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui.
Dans cette perspective, on comprend donc la logique de conférer au maire, acteur de terrain, ce rôle essentiel d'animation et de coordination de la prévention de la délinquance, rôle qui lui fait actuellement défaut.
Toutefois, il ne faut pas que ces nouvelles compétences confiées aux maires entraînent une confusion entre les missions de chacun des acteurs de la sécurité. Il ne doit pas s'agir d'un transfert de responsabilités de la part des services de police, de justice ou encore de l'éducation nationale vers les seuls maires, qu'il s'agisse, par exemple, de tutelle aux prestations familiales ou de rappel à la loi. Chacun doit rester à sa place, remplir sa mission d'origine et assumer sa seule responsabilité. Il s'agit non de transformer le maire en pseudo-shérif, mais d'en faire le coordonnateur de la prévention.
Puisque la sécurité constitue une préoccupation majeure de la population, il est normal que le maire, premier magistrat de la commune, soit un acteur essentiel de la prévention.
Les travaux parlementaires, tout particulièrement ceux de M. le rapporteur, ont permis de clarifier les domaines d'intervention respectifs des maires et des présidents de conseil général en matière d'aide sociale à l'enfance et d'aide à la parentalité. Ils ont permis de conforter la complémentarité des différents dispositifs et de coordonner le présent projet de loi avec celui qui réforme la protection de l'enfance.
Une vision globale et préventive de la délinquance ne peut pas faire l'impasse sur le sujet difficile de la toxicomanie et de la drogue qui facilitent le passage à l'acte violent et agressif, a fortiori chez les jeunes.
Ceux-ci sont, de loin, les principaux consommateurs de produits stupéfiants : parmi les usagers de cannabis interpellés, les deux tiers ont entre dix-huit et vingt-cinq ans, et 13 % sont des mineurs. Autrement dit, près de 80 % des interpellés ont moins de vingt-cinq ans !
Les consommateurs sont donc de plus en plus nombreux et de plus en plus jeunes.
L'objectif du présent projet de loi est de rendre enfin applicable, et réellement dissuasive, la loi du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l'usage illicite des substances vénéneuses.
Parallèlement à la réponse répressive, monsieur le ministre délégué, vous proposez d'élargir le dispositif législatif actuel en matière d'orientation sociale, sanitaire et thérapeutique, en rendant possible le prononcé d'une injonction thérapeutique dans le cadre d'une composition pénale ou encore en instaurant à titre de peine complémentaire l'obligation d'accomplir un « stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de stupéfiants ». Ce sont de bonnes initiatives.
Sur toutes ces mesures, et sur bien d'autres que je n'ai pas abordées, j'approuve votre démarche comme j'approuve les modifications proposées par le rapporteur, dont je tiens à nouveau à saluer l'excellent travail d'analyse et d'expertise.
C'est pourquoi les membres du groupe du RDSE dans leur majorité et moi-même nous soutiendrons ce texte en participant à son adoption.