... vous avez répondu avec éloquence en vous félicitant que, s'agissant du texte de 2003, tous les décrets d'application aient été publiés, sauf un, en 2007. Je vous en donne acte, monsieur le ministre. Mais vous me donnerez également acte que, subtilement, sur les huit lois relatives à la sécurité - on pourrait d'ailleurs aller jusqu'à dix, comme l'a indiqué Mme Le Texier - vous n'avez parlé des décrets d'application que pour trois d'entre elles.
Qu'en est-il de la publication des décrets d'application des textes adoptés au cours des deux dernières années ? C'est une question précise à laquelle, je n'en doute pas, vous apporterez une réponse précise.
Voici donc la huitième loi sur le sujet, présentée par M. le ministre de l'intérieur ou par M. le garde des sceaux. Chaque fois, nous nous sommes posé la question : s'il y a une deuxième loi, c'est peut-être parce que la première était insuffisante ; puis la question est revenue à propos de la troisième, de la quatrième... Et aujourd'hui, monsieur le ministre, si vous présentez une huitième loi, cela signifie-t-il que les sept précédentes étaient incomplètes, imparfaites, inefficaces, mauvaises ? Si, à la fin de cette législature, vous en êtes à nous soumettre tous ces articles, n'est-ce pas une manière de mettre en cause le bien-fondé de toutes ces lois ? Je crois, mes chers collègues, qu'il s'agit là d'un détournement du rôle du Parlement.
Vous voulez faire croire aux Françaises et aux Français qu'en élaborant une huitième loi vous agissez. En réalité, tout le monde sait que c'est une loi d'affichage. Vous n'aurez pas le temps de prendre les décrets d'application dans les prochaines semaines et tout devra être remis sur le métier. Nul n'ignore le contexte dans lequel intervient la discussion de ce projet de loi : des élections se profilent et, monsieur le ministre, vous y pensez autant que nous !
En présentant ce projet de loi sur la prévention de la délinquance, vous pensez que les Français se diront : « au moins, eux, ils travaillent ». N'aurait-il pas été plus pertinent de donner davantage de moyens à la justice, à tous les professionnels qui travaillent dans le domaine de la prévention et de l'éducation ?
Monsieur le ministre, je suis l'actualité, j'écoute les propos que vous tenez sur les médias. N'est-il pas surprenant que le programme du principal parti de la majorité actuelle comporte des dispositions qui sont contraires non seulement à la législation en vigueur, mais également au projet de loi que vous nous proposez d'adopter ? Je pense notamment aux peines planchers ou à certaines mesures concernant les mineurs.
Mes chers collègues, je vous invite à voter la motion tendant à opposer la question préalable afin de libérer le Gouvernement de la schizophrénie dont il semble atteint. En effet, monsieur le ministre, comment pouvez-vous dire au Parlement, en défendant un projet de loi, que vous refusez les peines planchers et, à l'extérieur, en soutenant le programme de votre parti, que les peines planchers sont absolument nécessaires ?
Eu égard au contexte actuel, la discussion du présent projet de loi nous conduit à des exercices intellectuels peu productifs. Nous pourrions donc parfaitement alléger l'ordre du jour du Parlement et, ainsi, promouvoir un confort intellectuel que vous pourriez apprécier autant que nous.
S'agissant du rôle du maire, le présent texte comporte de nombreuses ambiguïtés.
Le maire n'a pas à assumer les compétences dévolues à la police nationale. Confondre leurs compétences, c'est risquer - on le constate d'ores et déjà ici ou là - des tentatives de mainmises municipales dans des domaines qui, en vertu de la loi et de la Constitution, relèvent de la responsabilité de l'État. Cette responsabilité doit être exercée - c'est une garantie républicaine forte - par la police nationale, donc par l'État, un État républicain, dans le cadre de ses pouvoirs régaliens.
De la même manière, confondre les compétences du maire et celles des magistrats, c'est risquer des évolutions inacceptables et préjudiciables à la séparation des pouvoirs.
Il ne faut pas vouloir que le maire fasse tout ! Comme nombre de maires l'ont eux-mêmes souligné, une telle situation deviendrait très vite intenable.
Que le maire soit un partenaire - au sens fort du terme - des services de l'État, de la justice, de la police nationale, nous sommes d'accord ! En revanche, qu'il devienne un auxiliaire de justice ou un substitut, nous ne pouvons l'accepter.
Selon le rapporteur Jean-René Lecerf, ce projet de loi, s'il est adopté, ne conférera au maire aucune prérogative substantielle effective en matière judiciaire pour ce qui relève de la répression et de la sanction. Si tel est le cas, une question vient immédiatement à l'esprit : pourquoi faut-il changer la loi ?