Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vient de le préciser Yves Coquelle, nous arrivons à un point très important du texte.
Cette nouvelle série d'articles est issue de l'adoption par l'Assemblée nationale d'amendements présentés par M. Jean-Claude Lenoir, le rapporteur de la commission des affaires économiques, sur la composition et le rôle de la Commission de régulation de l'énergie.
Lors de son intervention sur l'article 2 bis, Yves Coquelle a souligné l'aspect positif de la prise de conscience par les députés notamment du caractère particulièrement illégitime de ce type d'autorité.
Ainsi, un premier amendement a permis d'introduire, dans la composition de la CRE, des parlementaires ainsi qu'un représentant des consommateurs.
Nous ne pouvons qu'adhérer aux propos du rapporteur selon lesquels « s'il peut être nécessaire, dans l'intérêt même du fonctionnement de la démocratie, que certaines activités échappent aux autorités élues, rien ne le justifie politiquement s'agissant de la régulation d'activités économiques ». Nous sommes d'accord.
Il a également déclaré que « la Commission de régulation de l'énergie n' [était] pas toujours restée strictement dans son rôle » à l'occasion de certaines de ses prises de position. Nous sommes toujours d'accord.
Et voilà qu'un amendement émanant de la commission des affaires économiques du Sénat tend à la réécriture de cet article pour revenir à l'ancienne composition de la CRE, au prétexte de garantir l'indépendance de celle-ci et la stricte séparation des pouvoirs.
Monsieur le rapporteur, de quelle indépendance nous parle-t-on ? La CRE est-elle indépendante des directives de Bruxelles ? Certainement pas ! En revanche, elle dépossède les représentants du peuple de leur souveraineté dans le secteur de l'énergie, elle les empêche de mener toute politique publique dans le secteur de l'énergie.
Ainsi, l'amendement déposé par la commission des affaires économiques réaffirme très clairement la conception de ces agences.
La commission estime que la nomination de parlementaires au collège de la CRE relève d'une conception peu orthodoxe de la séparation des pouvoirs dans la mesure où des représentants du pouvoir législatif viendraient s'immiscer dans des compétences relevant traditionnellement du pouvoir exécutif, tout en reconnaissant que ces autorités administratives indépendantes ne sont pas rattachées directement à l'exécutif.
Il s'agit donc bien d'autorités indépendantes certes, mais surtout irresponsables et illégitimes.
Leur seule mission est de permettre l'avènement d'une concurrence libre et non faussée, d'opérer le déclin des opérateurs historiques chargés de missions de service public, tout en favorisant l'arrivée de nouveaux entrants afin de leur garantir des marges suffisantes.
Pourtant, comment ne pas reconnaître que ces missions mêmes sont marquées idéologiquement et profondément politiques ?
Elles tendent à organiser la fin du service public dans le secteur économique pour répondre au dogme libéral en vertu duquel le marché concurrentiel est le maître mot de toute politique publique.
Elles visent à entériner l'absence de toute volonté politique d'influer et de réguler la sphère économique pour répondre aux besoins fondamentaux des femmes et des hommes de notre pays.
Elles sont, enfin, l'outil de la déréglementation et de la libéralisation du secteur de l'énergie.
Dans ce sens, le président actuel de la CRE, en réclamant la fin des tarifs réglementés et la privatisation des réseaux de transports, démontre qu'il a bien assimilé le rôle de cette commission.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous demandons la suppression de la Commission de régulation de l'électricité comme instance de régulation du marché de l'électricité.
Nous formulons cette demande depuis sa création en 2000.
Nous estimons que ces missions correspondent au contraire à une réelle compétence d'État, dont les grandes orientations doivent être définies démocratiquement par le peuple et ses représentants élus en toute transparence. C'est ce que nous disons depuis 2000, quelles que soient les majorités.
Tel est le sens de notre amendement.