L'article 3 prévoit, dans un contexte de concurrence accrue entre opérateurs électriques et gaziers, une forme de garantie offerte au consommateur final quant à la réalité des tarifs de vente des prestations de service.
Outre le fait que nous ne pouvons que fortement conseiller aux consommateurs particuliers de ne pas renoncer à recourir aux opérateurs historiques pour se faire livrer du gaz ou de l'électricité, cet article vise à transposer à la fourniture de gaz le principe de la tranche sociale de consommation déjà pratiqué pour l'électricité.
Lors de l'adoption de la loi de février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, avait été adopté un article 4 ainsi rédigé : « Les tarifs aux usagers domestiques tiennent compte, pour les usagers dont les revenus du foyer sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond, du caractère indispensable de l'électricité en instaurant pour une tranche de leur consommation une tarification spéciale produit de première nécessité. Cette tarification spéciale est applicable aux services liés à la fourniture. Pour la mise en place de cette disposition, chaque organisme d'assurance maladie constitue un fichier regroupant les ayants droit potentiels. Ces fichiers sont transmis aux distributeurs d'électricité ou, le cas échéant, à un organisme désigné à cet effet par les distributeurs, afin de leur permettre de notifier aux intéressés leurs droits à la tarification spéciale. Les distributeurs d'électricité ou l'organisme qu'ils ont désigné préservent la confidentialité des informations contenues dans le fichier. Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa. »
Nous retrouvons ce dispositif dans le cadre de cet article 3, puisque son paragraphe I stipule : « V. - Les clients domestiques ayant droit à la tarification spéciale produit de première nécessité mentionnés à l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée bénéficient également, à leur demande, pour une part de leur consommation, d'un tarif spécial de solidarité applicable à la fourniture de gaz naturel et aux services qui lui sont liés. Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent V. »
Nous avons eu l'occasion de souligner, lors de l'examen de l'article 1er, ce que nous entendions quant au champ d'application même de cette exemption d'application des principes de fixation des prix par le marché, mais là n'est pas la question.
Ce qui nous est proposé ici, c'est de transposer le principe du tarif de première nécessité, illustration - devons-nous le rappeler ? - du droit à l'énergie tel qu'il est défini par les dispositions législatives les plus récentes.
S'agissant des objectifs du service public, la loi de 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité dispose à l'article 1er :
« Il concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit à l'électricité pour tous, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique.
« Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité, et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique. »
Cette démarche fut d'ailleurs confirmée par la loi portant engagement national pour le logement s'agissant du contenu de l'intervention des fonds départementaux de solidarité pour le logement, puisque l'article L. 115-3 modifié du code de l'action sociale et des familles fait de la prise en charge des impayés de quittances d'énergie l'une des missions de cette intervention.
Qu'on le veuille ou non, avec l'adoption de ce projet de loi, le droit à l'énergie risque d'être mis à mal, puisque tout va tendre, dans la logique du texte qui nous est soumis, à faire de la réglementation des tarifs l'exception et de la mise en oeuvre - sans limites - du marché, la règle.
Nous savons également ce que signifie le droit à l'énergie, constitutif de la mise à disposition aux familles les plus précarisées d'une énergie à moindre coût mais aussi de moindre qualité.
Pour notre part, nous voulons passer de la tranche sociale de consommation à un nouveau principe, celui de la consommation sociale, en appliquant de manière générique aux particuliers dont la situation sociale, traduite en termes de ressources, est délicate, le principe du tarif réglementé, quel que soit l'opérateur choisi.
L'énergie ne peut durablement constituer, à l'instar des télécommunications et de l'ensemble des frais imputables à l'occupation et à l'entretien de l'habitation principale, un poste budgétaire sans cesse plus important pour les ménages les plus modestes.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous proposons d'adopter.