Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, avec cet article 3 bis, l'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi un dispositif permettant au consommateur final d'électricité ayant fait le choix de la concurrence de bénéficier d'un tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché.
Cet article illustre lui aussi l'échec de la libéralisation amorcée et les contradictions qu'elle engendre. Nous ne cessons de le répéter, peut-être finirez-vous par l'entendre !
Comme le rappelle la commission dans son rapport, la facture énergétique s'est considérablement alourdie ces dernières années. Les prix ont explosé, mettant en péril des entreprises. Dès lors, il n'est pas étonnant que montent de toute part des inquiétudes, y compris émanant des entreprises.
C'est dans ces conditions que l'Assemblée nationale a essayé de trouver un palliatif, en ajoutant un troisième tarif, à mi-chemin entre l'actuel tarif réglementé et le prix du marché.
Ce tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché est destiné à des consommateurs ayant dans un premier temps fait valoir leur éligibilité et choisi de bénéficier des prix plus faibles proposés par la concurrence.
Il est le signe patent d'un échec. Il montre que la libéralisation, si elle bénéficie certes aux actionnaires, si elle peut sembler intéressante à court terme, ne favorise ni les entreprises ni l'économie, puisqu'elle est au final synonyme de hausse des prix. Mais il est vrai que j'entends par économie celle qui est au service des populations et non de la finance.
Que se passera-t-il si, au bout de deux ans, le tarif dérégulé augmente encore ? Les entreprises devront-elles quitter ce système « provisoire » et subir les prix du marché libre, qui pourront, d'ici là, avoir de nouveau augmenté de 50 % à 60 % ? Il est à craindre que l'interdiction de revenir aux tarifs régulés ne pousse les entreprises concernées à délocaliser, voire à fermer.
L'existence de ce tarif ne réglera rien. Il contribuera, en revanche, à faire peser des risques sur l'avenir de l'actuel tarif réglementé, auquel la commission a pourtant rappelé son attachement.
En effet, les orientations européennes, en imposant la libre concurrence, et donc la liberté totale des prix, exigeront, à terme, la disparition de tout ce qui est susceptible d'y faire obstacle. C'est d'ailleurs le problème que soulève la commission des affaires économiques quand elle indique que le caractère renouvelable de la disposition créerait de fait une situation pérenne contraire aux orientations européennes.
C'est aussi ce qu'affirme la Commission européenne elle-même quand, sur ce point, elle souligne clairement que la modération des tarifs de GDF est un obstacle à l'entrée sur le marché français et qu'elle est donc anticoncurrentielle.
Dans ces conditions, « l'ajustement du marché », ce sera en réalité l'ajustement obligatoire sur le prix fort.
Cet article 3 bis et les amendements que vous proposez montrent que vous doutez vous-mêmes à la fois des orientations européennes que vous soutenez et des garanties que vous cherchez à offrir face aux conséquences de ces orientations. Politiquement, tout cela n'est pas très bon !
J'ajoute que le coût de ce tarif sera supporté, en définitive, par les usagers, particuliers et PME notamment. Nous y reviendrons à propos de l'article 3 ter.