Intervention de David Assouline

Réunion du 4 mars 2006 à 21h00
Égalité des chances — Article 24

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Ce qui me choque le plus dans ce débat, c'est que n'ait pas été abordé ce sujet de société fondamental, et pourtant rarement débattu dans cet hémicycle ou ailleurs : l'éducation des enfants, au sein d'un monde affecté par des bouleversements gigantesques, qui « percutent » l'éducation elle-même. On n'en parle pas ! Ces bouleversements, chacun peut les voir !

Nous-mêmes, en tant que parents et citoyens, nous sommes un peu perdus, car nous avons été élevés dans un monde où les règles, mais aussi les messages que nous recevions et la façon dont se transmettaient les modes de vie, étaient relativement clairs. Or que se passe-t-il aujourd'hui ?

Je suis déjà intervenu sur ce sujet en évoquant l'impact des médias, notamment de la télévision, sur l'éducation, mais aussi, plus globalement, sur la société.

Nous sommes à une époque où le chef d'un grand groupe télévisuel, en l'occurrence M. Le Lay, pour ne pas le nommer, peut dire, sans être sanctionné ou montré du doigt par les instances dirigeantes de ce pays, que TF1 a pour vocation de dégager du temps de cerveau humain disponible afin de permettre à Coca-Cola de vendre ses produits, ce qu'il assume entièrement, une époque où l'on envoie à nos jeunes et à nos concitoyens des messages déstructurants qui peuvent se résumer à la formule : « je consomme, donc je suis » ! Le zapping, le fait de passer d'une chose à l'autre, est devenu une pratique généralisée !

Toute cette déstructuration provoque effectivement des dégâts, auxquels les parents sont confrontés dans l'éducation de leurs enfants, et il ne s'agit pas uniquement des parents pauvres ou issus des classes défavorisées.

Nous sommes un certain nombre ici à être parents. Pour ma part, en tant que parent, j'essaie de me mettre à la page, d'être présent, et je ne pense pas être spécialement archaïque.

Mais je sais aussi que j'ai reçu une éducation qui m'a permis de surmonter les difficultés de l'adolescence. Car nous sommes tous passés par des moments où nous aurions pu franchir la ligne jaune, basculer, « décrocher » scolairement, mais grâce à la volonté de nos parents et aux moyens dont ils disposaient, nous avons pu nous ressaisir. Or ces moyens ne sont pas à la disposition des couches défavorisées de la population.

Face à ces problèmes, il aurait fallu envisager, dans ce projet de loi pour l'égalité des chances, tous les moyens supplémentaires, législatifs mais aussi humains, susceptibles d'aider ces parents, au niveau tant social - je pense notamment à l'École des parents - qu'éducatif, à travers l'instauration d'un dialogue entre la communauté éducative et les parents.

En effet, comme l'a très bien dit Jean-Luc Mélenchon, il arrive quelquefois que le décrochage scolaire des jeunes soit dû non pas à une quelconque faute des parents, qui n'auraient pas suivi suffisamment la scolarité de leurs enfants, mais à une carence de l'institution scolaire elle-même.

Tout cela est balayé dans ce projet de loi ! Ce qui est choquant et pour le moins politique, dans la façon dont cette question est abordée, c'est qu'elle aboutit à montrer du doigt des parents appartenant à une certaine catégorie sociale, dans la mesure où ce texte a pour objet de donner plus à ceux qui ont moins.

On ne dit pas comment on va aider les parents, mais comment on va les sanctionner et les culpabiliser ! Bien sûr, il y a des parents coupables, y compris dans les classes défavorisées. Mais le problème n'est pas là !

Si encore la cause principale du décrochage scolaire était la démission des parents ! Mais, selon les enseignants, les parents et tous ceux qui connaissent ces réalités, tel n'est pas le cas ! La raison principale du décrochage scolaire est d'ordre social, donc beaucoup plus fondamentale, et réside dans des valeurs transmises quotidiennement, basées sur la loi du plus fort, l'argent facile et le zapping.

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