Le présent article, qui modifie l’article L. 551–1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, détaille les situations dans lesquelles le préfet peut ordonner le placement d’un étranger en rétention administrative.
Ainsi, l’alinéa 9 dispose qu’un étranger peut être placé en rétention lorsqu’il « doit être reconduit d’office à la frontière en exécution d’une interdiction de retour ».
Le groupe socialiste ne peut accepter cette possibilité nouvelle d’assortir une obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français allant de deux à cinq ans et s’y opposera tout au long de l’examen du texte.
Une telle disposition s’apparente selon nous – nous l’avons déjà dit – à un véritable bannissement de la personne concernée.
Par cette interdiction faite à une personne de séjourner dans notre pays, le Gouvernement remet au goût du jour une peine qui était pourtant tombée en désuétude en France, une peine infamante permettant de marginaliser des populations indésirables.
On trouve des analyses intéressantes des peines de bannissement et de l’exil qui existaient en Europe aux XVIe et XVIIe siècles. L’objectif recherché était alors non pas de faire œuvre de justice, mais plutôt de manifester sa force de façon violente, d’exclure l’autre.
Si l’on entre dans le détail de cette procédure d’interdiction de retour sur le territoire français, nos craintes sont alors confirmées : tout étranger qui fait l’objet d’une mesure d’éloignement est susceptible d’être frappé par une interdiction de retour. Cette double peine va vraisemblablement devenir automatique.
L’interdiction ne se limite pas au territoire français mais englobe l’ensemble du territoire européen. Aucun dispositif n’est prévu afin de protéger d’un tel bannissement des catégories d’étrangers qui ont pourtant vocation à séjourner en France.
La directive Retour excluait explicitement les personnes victimes de traite des êtres humains ou ayant fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine et coopérant avec les autorités.
Le projet de loi ne prévoit pas de mécanisme permettant à l’étranger frappé d’une interdiction de retour sur le territoire français ou IRTF d’annuler son inscription au système d’information Schengen lorsque l’IRTF aura été abrogée ou annulée, alors qu’une telle inscription se traduira pour l’individu concerné par l’impossibilité d’obtenir un visa ou un titre de séjour dans un pays européen.
Enfin, et je terminerai sur ce point, monsieur le président, le dispositif de reconduite d’office à la frontière en exécution d’une interdiction de retour ne prend pas en compte l’évolution de la situation des personnes concernées ; je pense non seulement à la situation personnelle des individus, mais aussi à celle du pays d’origine, qui ont pu basculer dans l’intervalle et qui pourraient justifier l’obtention d’un droit d’asile.
Mes chers collègues, j’espère que vous conviendrez avec nous qu’une telle notion d’interdiction de retour sur le territoire français est trop risquée et n’a pas de place dans notre corpus juridique, et qu’il faut par conséquent supprimer l’alinéa 9 de l’article 30.