Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 9 février 2011 à 14h30
Immigration intégration et nationalité — Article 33, amendements 175 176 177

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements n° 175, 176 et 177.

Avant tout, je souhaite faire une remarque préliminaire, qui, d’ailleurs, pourrait s’appliquer à la discussion que nous avons eue précédemment.

Une chose est de revenir sur le CESEDA, ce que vous ne voulez pas, contrairement à nous. Pour autant, cela ne signifie pas ne pas avoir de politique d’immigration. Le problème est, en réalité, de définir cette politique, mais il n’est plus l’heure d’aborder ce débat. Une autre chose est de dénier aux étrangers les droits élémentaires dont bénéficie toute personne susceptible d’être privée de liberté. Que la situation soit claire ! Le champ est différent.

Monsieur le ministre, vous évoquez sans cesse le problème des étrangers qui viennent en France, les directives européennes, le CESEDA, votre politique d’immigration, etc. Il existe une autre question sur laquelle on ne peut pas transiger : toute personne humaine a des droits élémentaires qui doivent être respectés.

L’article 33 définit le nouveau régime de l’assignation à résidence et procède à des modifications de l’actuel livre V du CESEDA.

D’une part, il prévoit que la durée de cette nouvelle assignation à résidence, prononcée par l’autorité administrative, peut être de six mois renouvelables, laps de temps que nous trouvons extraordinairement long. Pourraient, en outre, tomber sous le coup de cette mesure les étrangers auxquels un délai de départ volontaire n’a pas été accordé. Ce sont les premiers points sur lesquels nous sommes en désaccord.

D’autre part, ce même article étend la mesure pénale que constitue la surveillance électronique aux personnes qui font l’objet d’une assignation à résidence. Ce dispositif vise normalement et expressément les personnes mises en examen ou condamnées par l’autorité judiciaire et qui peuvent bénéficier d’un aménagement de peine.

Le présent projet de loi prévoit que cette mesure puisse être prise par l’autorité administrative les cinq premiers jours, ôtant ainsi la garantie du juge des libertés et de la détention, alors que dans le cadre de la procédure pénale seule l’autorité judiciaire est compétente pour décider d’une telle mesure.

En effet, le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention est compétent lorsqu’il s’agit d’une mesure alternative à la détention pendant le contrôle judiciaire. Vous connaissez cela par cœur, mes chers collègues.

Ce dispositif reflète donc parfaitement la volonté du Gouvernement de criminaliser la présence étrangère. Les personnes étrangères se trouvant en rétention ne sont pas poursuivies ou condamnées pour un délit ou un crime !

Il nous semble inconcevable que des personnes étrangères, parents d’enfants mineurs, en attente de l’exécution d’une décision administrative de reconduite fassent l’objet de mesures relevant du champ pénal.

Enfin, l’article 33 prévoit que les forces de police ou de gendarmerie aient la charge du suivi et du contrôle du bracelet électronique durant l’assignation à résidence.

Or les forces de police ont déjà pu exprimer leur mécontentement par rapport à la dérive de leurs missions ; elles devront encore remplir une nouvelle tâche bien éloignée de leur fonction première qui est le maintien de l’ordre public et la recherche des infractions.

Par ailleurs, il est aberrant que l’ordre administratif – on comprend que les magistrats administratifs se mettent massivement en grève demain – dispose d’un pouvoir appartenant à l’ordre judiciaire, seul garant des libertés individuelles.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 33.

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