Cela dit, l’administration pourra, dans les hypothèses visées à l’alinéa 20 de l’article 33, prononcer une assignation à résidence pour une durée pouvant aller jusqu’à quarante-cinq jours et renouvelable une fois.
Or un tel délai me semble tout à fait disproportionné au regard de l’article 41 du projet de loi, qui prévoit que le juge des libertés et de la détention – un magistrat indépendant – peut ordonner la prolongation de la rétention pour une durée maximale de vingt jours.
Nous considérons quant à nous – il s'agit toujours du même débat de principe – qu’il est anormal que les pouvoirs de l’administration soient supérieurs à ceux d’un magistrat dont le rôle est de protéger les libertés, comme le précise d'ailleurs l’article 66 de la Constitution.
Il nous semble donc logique de rendre homogènes ces deux délais.
En ce qui concerne l’assignation à résidence, j’ai noté que M. le rapporteur faisait preuve d’une prudence qu’il convient de saluer.
En effet, dans son rapport, il a souligné que cette nouvelle mesure d’assignation à résidence comme alternative à la rétention « ne semble pas totalement compatible avec l’article 15 de la directive Retour qu’elle vise à transposer ».
Il a même ajouté que « l’assignation à résidence, telle que définie par l’article L. 561–2 nouveau, constitue simplement une alternative à la rétention, que le préfet n’est en aucun cas tenu de mettre en œuvre, même si une telle mesure est suffisante pour s’assurer de la personne de l’étranger en instance de reconduction. »
Pour lui, « introduire une priorité de l’assignation à résidence serait d’une part largement incompatible avec les conditions concrètes de l’éloignement des étrangers, d’autre part serait sans doute à l’origine d’un contentieux abondant. »
Ici encore, on reconnaît que ce projet de loi crée des difficultés juridiques : manifestement, ces dispositions n’entrent pas dans le cadre de la transposition de la directive Retour ; en outre, on permet au pouvoir administratif d’assigner un étranger à résidence pendant des délais considérables, puisqu’il s'agit non pas de vingt jours, mais de quarante-cinq jours renouvelables, soit quatre-vingt-dix jours au total.
Il y a ici un glissement, qui n’est pas un glissement progressif vers le plaisir, mais qui, malheureusement, est contraire à nos principes en matière de libertés individuelles et fondamentales.