Je saisis cette occasion pour poser une question au Gouvernement sur un point évidemment en relation avec l’article 34. Il s’agit de la procédure administrative et contentieuse de l’éloignement d’étrangers.
Je voudrais attirer votre attention sur le récent arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’application du règlement européen dit « Dublin II », texte qui organise les mouvements de personnes entrées sur le territoire de l’Union européenne et qui fixe, en particulier, la règle du pays de primo-arrivée.
Dans un arrêt de Grande chambre du 21 janvier dernier, M.S.S. contre Belgique et Grèce, la Cour européenne des droits de l’homme a considéré que le transfert d’un demandeur d’asile afghan de la Belgique vers la Grèce, en application du règlement Dublin II, était contraire aux articles 3 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, articles qui sont respectivement relatifs à l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et au droit à un recours effectif.
Les juges de Strasbourg ont ainsi condamné non seulement la Grèce pour les lacunes graves qui sont constatées dans ce pays en matière de procédure d’asile et de traitement des demandeurs d’asile, mais aussi, par ricochet, la Belgique, laquelle avait renvoyé le demandeur d’asile afghan dans le pays méditerranéen par lequel il était arrivé en Europe.
D’une certaine manière, c’est la fin du règlement Dublin II et de la règle du pays de primo-arrivée.
Mais, au-delà de la condamnation de la Grèce et de la Belgique, c’est, plus largement, l’application automatique du règlement Dublin II qui est visée. Les juges considèrent en effet qu’il appartient aux États membres de prendre en considération les risques de mauvais traitements dans le premier pays européen d’accueil, d’une part, et dans le pays d’origine où risque d’être renvoyé le demandeur d’asile, d’autre part.
Plusieurs États membres ont déjà entendu ces critiques et ont limité leurs transferts vers la Grèce en procédant à des examens individuels. La Norvège, la Finlande, l’Allemagne, la Suisse et la Suède ont ainsi devancé leurs partenaires européens dès 2008.
Plus récemment, et depuis cette décision de janvier dernier, le Royaume-Uni, l’Autriche et le Danemark les ont rejoints.
La France fait partie des pays qui continuent à renvoyer des demandeurs d’asile en Grèce. Je souhaiterais donc savoir, monsieur le ministre, quand et comment le Gouvernement entend tirer les conséquences de cet arrêt majeur, qui consacre le droit d’asile comme prévalant contre les autres considérations.