Le nombre de médecins du travail en exercice est actuellement évalué à 6 000 pour une population de 23 millions de salariés, soit un médecin du travail pour 3 800 personnes. Un constat s’impose donc rapidement : il manque actuellement en France plusieurs centaines de médecins du travail.
Or, combler ce déficit n’est pas chose aisée car le métier de médecin du travail est bien spécifique. Les médecins qui se destinent à cette profession suivent d’abord un cursus de deux ans dans des services cliniques, puis de deux ans dans des services de médecine du travail. Certains médecins développent en plus une compétence spécifique, le plus souvent en ergonomie ou en toxicologie, et assurent un rôle de conseil auprès de leurs collègues.
Une autre spécificité des médecins du travail est de travailler au sein de services médicaux regroupant plusieurs médecins, ayant chacun en charge les entreprises de leur secteur géographique. Ils acquièrent ainsi une expérience supplémentaire du fait d’un travail collectif de partage d’informations et de connaissances.
Qui plus est, l’activité des médecins du travail ne se borne pas à des examens cliniques. Un tiers du temps du médecin du travail doit être consacré à l’action sur les lieux de travail, en vue d’identifier les risques pour la santé et d’adapter sa surveillance médicale, mais également pour agir sur les risques et proposer des mesures de correction. Dans ce cadre, il est de plus en plus aidé par d’autres professionnels de santé au travail – infirmières, hygiénistes, ergonomes –, qu’il doit pouvoir coordonner.
Le médecin du travail possède ainsi une expertise particulière, fruit de sa formation et de son expérience, qui se révèle indispensable pour garantir de bonnes conditions de santé au travail. Il remplit donc des missions qu’un autre médecin ne saurait pas exercer. Chacun sa spécialité et sa spécificité : un médecin du travail a les siennes, un médecin hospitalier ou un médecin de ville en a d’autres.
Créer un régime dérogatoire en autorisant des médecins non spécialisés en médecine du travail à assurer le suivi médical des salariés au lieu d’augmenter le nombre de « vrais » médecins du travail relève de l’absurdité la plus totale.
En suivant aveuglément sa logique comptable, qui consiste à réduire toute dépense publique dès que cela est possible, le Gouvernement ne va créer en réalité que des coûts indirects : en ne permettant pas aux salariés de bénéficier d’un réel suivi médical dans les meilleures conditions, on augmente le risque de voir se développer des pathologies et de créer des accidents ; de fait, on augmente les dépenses de l’assurance santé.
Au final, le Gouvernement nous impose une fois de plus sa logique à court terme incohérente, irresponsable et destructrice. Nous la refusons ! C’est pourquoi notre groupe propose cet amendement de suppression de l’alinéa 6.