En effet, le problème n'est pas ici de savoir s'il convient ou non que le président du conseil général prenne des mesures. Il serait évidemment absurde qu'il ne puisse rien faire. En réalité, si nous n'acceptons pas cette mesure, c'est parce qu'elle est profondément injuste et inégalitaire.
Comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner à maintes reprises, il est quand même un peu « fort de café », dans un texte qui prétend favoriser l'égalité des chances, de proposer des mesures aussi inégalitaires, qui toucheront particulièrement les familles qui sont les plus éprouvées et qui connaissent le plus de difficultés.
Nous avons évoqué tout à l'heure l'inégalité qui s'instaurera entre les territoires. En effet, en fonction des départements, les présidents de conseils généraux prendront des mesures différentes pour des cas similaires.
En outre, le sort des enfants sera particulièrement inégalitaire. Selon que vous vivrez dans une famille à enfant unique - car il en existe dont les parents présentent des carences éducatives - ou dans une famille qui compte deux, trois, quatre ou cinq enfants, vous serez traité différemment. Les parents de familles nombreuses, qui éprouvent le plus de difficultés, seront les plus durement sanctionnés.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit, en quelque sorte, que puisque vous ne demandiez pas que les enfants soient placés dans des centres éducatifs fermés dès l'école maternelle, nous devrions nous estimer heureux !
En tout cas, votre projet est profondément inégalitaire, car il vise uniquement les enfants des familles populaires, alors que les allocations familiales, je le rappelle, sont universelles.
À l'évidence, l'importance des allocations familiales est moindre pour les familles aisées. Il s'y trouve pourtant des enfants qui pratiquent l'absentéisme scolaire, mais leurs parents, y compris ceux qui présentent des carences éducatives, trouvent le moyen d'éviter les sanctions. Par exemple, ils inscrivent leurs enfants dans des pensionnats ou des établissements privés, où ils bénéficient d'un suivi individuel. La suppression des allocations familiales aura beaucoup moins d'impact sur la situation sociale de ces familles.
Et ces parents ne se trouveront même pas stigmatisés, puisqu'ils auront mis leurs enfants à l'abri. Ils n'auront donc aucun problème.
Il est inacceptable de nous proposer, dans un texte qui se veut pour l'égalité des chances, une mesure aussi injuste et inégalitaire, qui vise, M. le ministre l'a montré, les enfants déjà stigmatisés des quartiers en difficultés.