Cet amendement porte sur les modalités de compensation de la pénibilité pour les travailleurs âgés.
Si l’on veut faire en sorte que les seniors, notamment les salariés âgés de 56 ans à 60 ans, puissent continuer à être exploités, il va bien falloir que l’on trouve le moyen de leur permettre de rester dans l’entreprise !
À l’époque de Robert Boulin, de Lionel Stoléru ou encore lorsque François Perigot menait les affaires du CNPF, le Conseil national du patronat français, on ne se posait pas tant de questions, vous vous en souvenez sûrement. On mettait l’argent qu’il fallait ! En général, on demandait à l’État – c'est-à-dire à l’impôt – de mettre au pot, et l’on organisait un plan massif de départs en préretraite des salariés âgés ayant la durée de cotisation nécessaire avant l’âge officiel autorisant la liquidation de la retraite. L’État satisfaisait les desiderata du monde patronal en consacrant l’éjection la plus efficace possible des salariés les plus âgés, en fait les plus coûteux au regard de la production.
Désormais, il va falloir organiser la présence de ces salariés au-delà du raisonnable. On cherche donc à adoucir la pilule de la prolongation de la vie professionnelle.
Nous avons déjà pointé que le texte recélait plusieurs moyens d’atteindre ces objectifs, mais l’article 27 ter A en offre de nouveaux. Ainsi, il propose une palette diversifiée de solutions aux employeurs imaginatifs pour conserver en activité leurs salariés les plus âgés.
L’article reproduit même, en tant que de besoin, le schéma de la cessation progressive d’activité, avec possibilité de mi-temps, ce qui aura un double avantage : premièrement, ne pas être victime de la moindre pénalisation du point de vue de l’emploi des seniors ; deuxièmement, geler au dernier salaire accompli à plein-temps le montant de l’indemnité de fin de contrat précédant le départ en retraite.
Par ailleurs, on peut fort bien demander à un salarié âgé et expérimenté d’accomplir à mi-temps l’essentiel de ce qu’il faisait précédemment à temps plein ou lui confier des missions spécifiques – conseils en sécurité, formation des nouveaux embauchés –, fondées sur cette expérience.
Ce que prévoit le huitième alinéa de cet article, c’est d’instrumentaliser le souhait légitime du salarié d’être dégagé de la pénibilité du travail en lui permettant de cumuler des heures sur son compte épargne-temps, en espérant, évidemment, qu’il liquidera ce compte non pas peu à peu en se ménageant des jours de repos dans ses dernières années d’activité, mais tout d’un coup, en prenant des congés dans les derniers mois précédant son départ en retraite. L’idée est que, à force d’individualisation des situations, le salarié accepte de travailler jusqu’au bout, ou presque, comme les autres.
À dire vrai, c’est là une étrange conception de la lutte contre la pénibilité du travail !
Cela étant, si vous voulez notre sentiment profond sur ce sujet, nous inclinons à penser que, dans nombre de cas, les employeurs préféreront passer par les services de santé au travail pour que joue pleinement la clause de la mise en invalidité.
En attendant, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à voter cet amendement.