L'article 25 vise à définir les modalités de suspension des prestations familiales dans le cadre du contrat de responsabilité parentale. Il adapte le code de la sécurité sociale aux dispositions concernant le contrat de responsabilité parentale en matière de suspension des allocations familiales et du complément familial.
La commission des lois propose la suppression de cet article. C'est une excellente idée, que nous partageons, puisque nous avons nous-mêmes déposé un amendement de suppression. Quant à la commission des affaires sociales, elle rappelle que, au moment de l'examen du projet de loi relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance, elle avait considéré comme inefficaces, voire injustes, la suspension et la suppression des prestations familiales.
L'idée de sanctionner les familles n'est pas nouvelle. La sanction financière existe depuis bientôt quarante ans, sans grand succès. En effet, un décret du 8 février 1966 prévoyait déjà des amendes allant d'un équivalent de 60 euros à 305 euros et des peines de prison de dix jours à deux mois. La suspension du versement des allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire était prévue par l'article L. 552-3 du code de la sécurité sociale, sur saisine de l'inspecteur d'académie.
En 2002, Nicolas Sarkozy, qui était alors ministre de l'intérieur, dans la logique de sa loi pour la sécurité intérieure, avait relancé l'idée de sanctionner les parents considérés comme déficients. Il avait proposé d'infliger une amende de 2 000 euros aux parents dont les enfants « sécheraient » plus de quatre demi-journées par mois.
La loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance a abrogé, faute de résultats probants et en raison de nombreuses critiques, la possibilité de suspendre les allocations familiales. Néanmoins, elle a permis l'instauration d'une contravention de quatrième classe, qui sanctionne d'une amende de 750 euros les familles considérées comme « déficientes ». Ainsi, le Gouvernement faisait, là encore, comme si tout pouvait se régler par la contrainte.
La suspension des prestations familiales suscite le rejet quasi unanime des acteurs de l'éducation, de la politique familiale et de la lutte contre les exclusions. Le conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, a lui-même émis un avis défavorable. Adopter une telle disposition serait faire vaciller toute l'architecture de la protection sociale !
Les allocations familiales sont un droit de l'enfant. Comme l'écrit le président de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, elles ont été créées non pas pour « décerner un brevet d'éducation », mais pour « atténuer la charge que représente un enfant dans une famille ». Ce ne sont pas non plus « des primes au mérite », comme le rappelle la Confédération syndicale des familles, la CSF.
Suspendre les allocations familiales ne fera qu'accroître la détresse des familles évidemment les plus pauvres. Le réseau Alerte, qui rassemble quarante et une fédérations et associations nationales de lutte contre la pauvreté et l'exclusion, pose la question : « Peut-on décemment responsabiliser par l'argent des familles qui n'ont rien ou quasiment rien pour vivre sans allocations ? ».
Les députés UMP qui ont déposé, le 11 mai 2005, une proposition de loi visant à rétablir la suspension des allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire affirment souhaiter « responsabiliser les acteurs de la démarche éducative que doivent être les parents ».
Mais comment demander à des familles de construire le projet scolaire de leur enfant et les conditions de sa réussite quand elles n'ont pas de travail, voire pas de logement ? Il y a 7 millions de pauvres en France et plus d'une personne sur dix dépend des minima sociaux, la hausse étant de 3, 4 % en 2004, soit le double de 2003.
Pour ces millions de Français et leurs familles, il s'agit non pas de chiffres, mais de difficultés et d'angoisses permanentes, voire de missions impossibles quand il s'agit de se loger, d'acquitter les factures impayées qui provoquent des coupures d'eau ou d'électricité et de payer le loyer ! Pensez-vous que ces parents ne s'intéressent pas à l'avenir de leurs enfants ?
Faudrait-il sanctionner ces femmes qui élèvent seules leurs enfants et que l'on fait travailler pour des salaires de misère comme caissières ou femmes de ménage à des heures où leurs enfants sont, en effet, censés être rentrés de l'école ?
En outre, jusqu'à preuve du contraire, c'est au juge des affaires familiales qu'il appartient de décider si l'obligation parentale est respectée ou non. Le projet de loi prévoit d'en faire une décision administrative, prise par un élu, avec toutes les dérives possibles. C'est inacceptable !
Et a-t-on sollicité l'avis des présidents des conseils généraux avant de décider de leur imposer une responsabilité qui n'est pas la leur ? A-t-on mené la moindre concertation avec les acteurs sociaux, éducatifs et familiaux concernés ?
Pour au moins toutes ces raisons, notre groupe demande la suppression de l'article 25.