Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsque l’on prend la parole après M. Maurey, il est difficile d’innover dans l’argumentation. Je ne relèverai donc pas ce défi !
Je tiens à remercier la commission de l’économie, qui a permis, dès la reprise de nos travaux, l’inscription de ce débat fort important à l’ordre du jour. Je veux tout particulièrement féliciter M. Hervé Maurey de son excellent rapport et saluer les contributions de nos collègues Xavier Pintat et Bruno Sido.
Tous les sénateurs, notamment les élus des territoires ruraux, ont particulièrement à cœur la question de la couverture numérique du territoire. Le département que je représente fait partie des treize départements où les zones blanches ne disparaissent pas, ce qui se révèle une injustice inacceptable. Tous, sénateurs, députés, ministres, et jusqu’au Président de la République lui-même au cours de son discours de Morée dénoncent cet état de fait.
Alors que j’avais fait de ce discours mon livre de chevet, je m’aperçois aujourd’hui que les promesses faites n’ont pas été tenues. Pourtant, le Président de la République a récidivé hier, à Aubusson, en reprenant pratiquement mot pour mot son propos de Morée : selon lui, la nécessité d’un désenclavement numérique de nos territoires constitue une véritable révolution. Mais comment faire une révolution si les promesses de l’État restent sans suite, si les engagements, pris par deux fois, du Président de la République ne sont pas respectés ?
Une telle situation est d’autant plus inacceptable que le rapport de M. Hervé Maurey a été voté à l’unanimité, personne ne le contestant ni ne s’interrogeant sur d’éventuelles visées politiques dont il est, chacun le reconnaît, totalement dépourvu.
Dans nos territoires, nous sommes aujourd’hui confrontés aux situations que l’on nous avait prédites. Dès à présent, certaines entreprises délocalisent leurs activités faute de pouvoir disposer du haut débit. Des problématiques s’annoncent d’ores et déjà irrécupérables. Je pense bien évidemment aux problèmes des services publics, notamment à la télémédecine, dont il a été fait état.
Dans certains territoires, la désertification médicale, c’est parfois, pour nos habitants, une question de vie ou de mort ! Dans la ruralité la plus profonde, comment le médecin de permanence le week-end, dont le secteur d’intervention s’étend sur plus de cinquante kilomètres, peut-il avoir accès au dossier médical s’il ne dispose pas d’une liaison numérique satisfaisante ? Quand une personne est en attente de soins, il est nécessaire que son médecin puisse prendre connaissance de son dossier médical. Or, sur mon territoire, c’est impossible !
L’urgence à laquelle sont confrontés ces territoires les a conduits à manifester leur révolte, qui s’est traduite par le vote que nous connaissons tous.
Cette injustice est encore plus insupportable dans les régions, lesquelles doivent, à l’image de la région Midi-Pyrénées, se substituer aux compétences de l’État. Comment pouvons-nous continuer à œuvrer en faveur du désenclavement numérique, alors que nous avons déjà apporté notre contribution aux TGV, aux routes nationales à hauteur de plus de 50 % et aux maisons de service public, en particulier aux maisons de santé ? Aujourd’hui, on nous demande non seulement de compenser à nouveau le désengagement de l’État sur le terrain, mais aussi de faire face à l’anarchie qui règne entre les opérateurs. Mettre fin à cette situation serait pourtant le minimum que l’État pourrait faire !
On en arrive en effet à des situations ubuesques. On a ainsi vu l’opérateur historique installer une fibre à côté de celle qui avait été mise en place par le conseil général ou une autre collectivité, un troisième opérateur, finalement retenu, ayant par la suite logé une troisième fibre !
Nous sommes donc dans une situation inacceptable et, lors des débats qui se succèdent dans cet hémicycle, nous ne pouvons que répéter ce que nous avons déjà dit. Je vous l’affirme, monsieur le ministre, nous commençons à désespérer. Les territoires ruraux sont tout à la fois révoltés et découragés. En effet, la couverture numérique, à en croire les sondages, constitue une demande essentielle des territoires. La situation va devenir ingérable.
Comme mes collègues, je vous demande, monsieur le ministre, d’apporter des réponses aux trente-trois propositions formulées par le rapport, qui me paraissent raisonnables. Au demeurant, la première des réponses n’est-elle pas de dire que, pour mener une révolution, il faut s’en donner les moyens ? Pourquoi ne pas souscrire à l’idée de créer un véritable ministère de l’aménagement du territoire et du désenclavement numérique, qui prendrait ce problème à bras-le-corps ? Cette première décision, assez simple à prendre, nous permettrait d’avoir un interlocuteur susceptible, sur le terrain, d’apporter les réponses que nous attendons.
Monsieur le ministre, pour les territoires ruraux qui ne bénéficient même pas d’une couverture en téléphonie mobile, les inégalités trop importantes engendrent une forme de désespoir, qui ne doit pas perdurer. En effet, contrairement à ce qu’on nous a laissé croire, la France figure – triste constat ! – au vingt-deuxième rang des vingt-six pays analysés dans ce domaine. Je vous demande donc de bien vouloir nous apporter des réponses propres à nous rassurer.