Intervention de Éric Besson

Réunion du 12 octobre 2011 à 14h30
Débat sur la couverture numérique du territoire

Éric Besson, ministre :

Je vous annonce ainsi que nous allons interroger les opérateurs sur l’avancement de leurs déploiements dès le début de l’année 2012, soit un an après avoir détaillé leurs intentions d’investissement. Je serai très clair, car je sais que c’est un point essentiel : si leur engagement d’investissement n’était pas respecté, la zone d’investissement privé serait réduite pour laisser la place aux projets des collectivités.

Il ne faut pas croire qu’il s’agit d’une menace prise à la légère par les opérateurs, auxquels je ne fais aucun procès d’intention, du reste, puisque beaucoup d’entre eux tiennent à déployer la fibre optique et font de ce déploiement l’un des éléments du développement de leur chiffre d’affaires. Cependant, si l’on prend les hypothèses les plus pessimistes que certains d’entre vous ont évoquées, ne plus être l’opérateur du réseau français d’accès à internet serait une remise en cause profonde du modèle économique de l’opérateur historique. Il n’y a donc aucun intérêt pour France Télécom à abandonner son modèle d’opérateur de réseau ; certains d’entre vous ont d’ailleurs entendu ces propos dans la bouche de son président, Stéphane Richard.

Par ailleurs, MM. Hervé Maurey et Bruno Retailleau m’ont interrogé sur le décret relatif à la connaissance des réseaux. Ce décret a été adopté une première fois par le Gouvernement le 15 janvier 2009. Cette version convenait aux collectivités territoriales mais a été annulée par le Conseil d’État le 10 novembre 2010. Depuis, nous avons modifié la base juridique, par la loi du 22 mars 2011 qui a habilité le Gouvernement à transposer le « paquet télécom » par voie d’ordonnance. Le Gouvernement a ainsi pu préparer une nouvelle version du décret, solide juridiquement et pouvant être mise en œuvre rapidement. Dans les prochains jours, le Gouvernement saisira l’ARCEP de cette nouvelle version.

J’ajoute que je suis favorable à la proposition, formulée par Bruno Retailleau, de réfléchir avec l’ARCEP aux moyens de compléter notre réseau de collecte – ce « RTE » numérique, si l’on peut dire –, ce qui est indispensable pour aider les collectivités à construire leurs réseaux d’initiative publique.

Concernant l’outre-mer – c’est l’objet de mon cinquième point –, le Gouvernement a mis en place, avec la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, une procédure de défiscalisation du déploiement des câbles sous-marins. Le Gouvernement a également prévu une majoration de l’aide accordée par le programme national « très haut débit » en outre-mer. Ces actions permettront d’améliorer la qualité des connexions à haut débit en outre-mer et de faire baisser les prix de l’accès à internet.

Je sais que certains d’entre vous, et notamment Hervé Maurey, ne sont pas convaincus par le principe de complémentarité entre investissements publics et investissements privés. Son rapport préconise non pas de concentrer l’investissement public sur les zones où il y a une carence d’investissement privé, mais de le développer également dans les zones où les opérateurs privés déploieront leurs réseaux.

Permettez-moi de considérer qu’il s’agit d’une erreur, et ce pour au moins trois raisons.

Tout d’abord, et ce n’est pas négligeable, cette préconisation est incompatible avec le cadre européen qui régit les aides d’État. Je voudrais rappeler que ces règles, qui ont été adoptées à l’unanimité des vingt-sept États membres, toutes tendances politiques confondues, interdisent de subventionner sur fonds publics des projets concurrents de projets privés existants. C’est un principe essentiel, car aucune entreprise privée n’investira si elle est menacée par la concurrence d’un projet bénéficiant d’aides publiques. Ce n’est que si, au bout de trois ans, le projet privé n’a pas avancé, que le projet public pourra être mis en œuvre. Il s’agit là d’une règle de bon sens, me semble-t-il, car elle permet à la fois de protéger l’initiative privée et de permettre l’initiative publique, tout en sauvegardant les deniers publics, en cas de carence de l’initiative privée.

Sur ce point, je partage l’analyse de Pierre Hérisson et même celle de celui qui s’est auto-qualifié de « souverainiste », Bruno Retailleau

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