Intervention de François Marc

Réunion du 22 novembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de François MarcFrançois Marc :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un vaste débat concernant les orientations qu'il était souhaitable de donner à notre pays s'est déroulé voilà quelques mois. Un certain nombre de défis ont alors été mis en exergue. J'en évoquerai quatre en particulier.

Le premier défi, c'est celui que représente l'affaiblissement de notre appareil productif. Tout le monde le sait, la France a connu au cours des cinq dernières années une dégradation de sa situation, notamment en matière de commerce extérieur et d'endettement. Nous avons entendu formuler ce matin quelques propositions à cet égard. Vont-elles contribuer à améliorer la situation ? L'avenir le dira. En tout état de cause, nous aurons l'occasion, au cours du débat, d'indiquer à quel point ces mesures nous semblent modestes.

Le deuxième défi, c'est celui de la dette publique, qui présente un caractère insoutenable. Ce point soulève des interrogations, me semble-t-il, car, si M. le ministre a annoncé ce matin qu'il espérait faire baisser quelque peu, en pourcentage du PIB, la dette de notre pays, nous avons ensuite entendu M. le rapporteur général exprimer sa crainte que celle-ci ne s'accroisse. La question reste donc posée ; en tout cas la dette publique est considérable.

Le troisième défi, c'est le défi écologique. Après la tenue des états généraux de l'environnement, nous attendons aujourd'hui que le Gouvernement présente des mesures concrètes.

Cela étant, je voudrais surtout insister sur le quatrième défi, celui que constituent notre modèle social malmené et la stagnation du pouvoir d'achat.

On a beaucoup parlé, ce matin, de compétitivité, de finance internationale, des dividendes, mais on a peu parlé des Français. C'est sur ce point que je souhaite appeler l'attention : les revenus des Français stagnent, l'écart de niveau de vie entre la France et les États-Unis s'est élargi depuis 2002, et neuf de nos partenaires européens jouissent désormais d'un niveau de vie supérieur au nôtre.

Alors que les rémunérations les plus élevées s'envolent, l'Institut national de la statistique et des études économiques a évalué à 57 euros par an et par salarié seulement la hausse du pouvoir d'achat enregistrée en France ces dernières années. C'est là le signe d'un creusement sans précédent des inégalités sociales.

Cela se traduit par une « relégation » des plus démunis et un désarroi croissant des classes moyennes. Le blocage de la promotion sociale nuit au dynamisme de notre société ; loin de se présenter à nos concitoyens sous les couleurs du progrès, l'avenir leur apparaît sombre et inégalitaire. Les difficultés sociales et économiques qu'ils rencontrent les conduisent à douter de la pertinence d'un système de réduction des inégalités qui ne parvient plus à réguler les excès du libéralisme.

Comment faire face à ce défi considérable ? Comment créer en France les conditions favorables au développement de la confiance ? Comment faire en sorte que notre modèle de société offre à chacune et à chacun une perspective d'amélioration de sa situation ?

Il est clair, mes chers collègues, que, pour répondre efficacement à ces questions fondamentales, il convient de faire le meilleur usage de l'outil de la fiscalité, afin de tendre vers un équilibre juste de la charge fiscale et de rétablir une véritable égalité devant l'impôt.

Cela vaut pour l'égalité entre les citoyens, cela vaut aussi pour l'égalité entre les territoires.

S'agissant de l'égalité entre les citoyens, il me semble que nous devons observer trois principes forts : tout d'abord, supprimer les nombreuses iniquités constatées, ensuite conforter la progressivité de l'impôt - sur ce point, nous sommes très inquiets de la politique actuellement mise en oeuvre par ce gouvernement -, enfin maintenir une imposition du patrimoine afin de lutter contre ce que l'on peut appeler la société de la rente.

Au regard de ces trois principes forts, la philosophie développée par ce gouvernement ne peut nous satisfaire, car les résultats qu'elle permet sont véritablement calamiteux.

Les chiffres sont là pour le prouver. Depuis cinq ans, la politique menée en matière fiscale a entraîné une aggravation des inégalités. L'étude de l'INSEE précédemment citée le démontre s'il en est besoin.

Les disparités apparaissent bien sûr dans les revenus : les foyers les plus riches ont vu leurs revenus progresser de 42, 6 %, alors que la progression n'a été que de 4, 9 % pour les 90 % de foyers les moins riches.

Le creusement des inégalités vaut aussi pour les patrimoines. Comme nous le savons, les revenus du patrimoine ont progressé plus vite que ceux du travail. Le patrimoine financier médian des 10 % des foyers les plus riches a ainsi augmenté de 40 %, contre seulement 20 % pour les autres catégories.

En définitive, si l'on dresse le bilan détaillé des mesures adoptées au cours des cinq dernières années, qu'observe-t-on de façon réellement objective ? On constate que tous les contribuables ayant un revenu supérieur à quinze fois le SMIC en sont sortis gagnants et que les autres ont vu leur situation régresser.

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