Intervention de François Marc

Réunion du 22 novembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de François MarcFrançois Marc :

... et budget « déraisonnable », a-t-on pu entendre dans la bouche du ministre de la défense, fondateur du Nouveau Centre, Hervé Morin pour ne pas le citer.

De fait, votre budget est construit sur une hypothèse de croissance de 2, 25 % et sur un baril de pétrole à 73 dollars, alors que le prix de ce dernier s'élève presque, aujourd'hui, à 100 dollars ; et nous savons qu'une différence de 20 dollars sur le prix du baril représente 1 point de croissance.

La présentation de ces hypothèses pour l'exercice 2008 nous semble donc, sur la foi de ces observations, déraisonnable. Et je ne parle pas de la crise de la finance internationale, des écarts de taux d'intérêt, bref de tout un ensemble d'éléments qui nous conduisent à douter très fortement de la véracité des chiffres qui nous sont soumis et de la crédibilité de ce projet de budget.

Mais ce qui nous inquiète davantage, c'est le déficit d'ambition face à l'élargissement de la fracture sociale dans notre pays. Mes chers collègues, il y a en effet véritablement aujourd'hui une poursuite des orientations qui ont déjà été mises en oeuvre dans la loi TEPA.

J'évoquerai brièvement deux mesures : la réforme des droits de succession et le bouclier fiscal.

La réforme des droits de succession nous a été présentée comme une mesure qui allait bénéficier au plus grand nombre. Or, nous avons constaté qu'il s'agissait surtout de servir les 4 % de détenteurs de patrimoines les plus aisés : nous sommes donc véritablement passés à côté de l'objectif qui était visé.

Quant au bouclier fiscal, selon l'argumentation qui nous avait été présentée dans cet hémicycle, il allait bénéficier à de nombreuses personnes modestes. Nous avons même entendu dire que le nombre de contribuables concernés serait de l'ordre de 100 000. Mais où sont ces 100 000 Français ? On sait que, pour l'instant, 4 000 à peine se sont présentés devant les guichets du Trésor pour bénéficier de cette mesure... Les dizaines de milliers de personnes modestes à qui cette disposition était normalement destinée ne se sont pas manifestées !

Toute l'argumentation qui nous est présentée quant aux orientations du projet de loi de finances est donc, d'une certaine façon, fallacieuse, puisque les dispositions présentées visent à apporter des réponses non pas au plus grand nombre mais seulement à quelques-uns. On en trouve d'ailleurs dans ce projet de budget quelques illustrations, telle la disposition concernant l'allégement de la fiscalité sur les dividendes.

Cette mesure a laissé pantois le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Carrez, qui l'a estimée totalement inadaptée. Les dividendes du CAC 40 ont progressé de 70 % en quatre ans, alors que les salaires en France n'ont augmenté que de 6 %. Il s'agit à nouveau de favoriser un peu plus les détenteurs de dividendes. On voit bien dans quel sens va ce budget !

Je voudrais aussi évoquer l'impasse faite sur l'impôt minimum. Ce sujet ayant été évoqué lors de la discussion de la loi TEPA, on pensait qu'il y aurait quelque chose dans le projet de loi de finances, mais tel n'est pas le cas !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons le sentiment que ce projet de budget pour 2008 poursuit les orientations que nous avions déjà dénoncées lors de la discussion de la loi TEPA, à savoir la déconstruction de l'impôt progressif, l'augmentation inévitable, après les élections municipales, des impôts tels que la TVA ou la CSG, la mise en place de franchises pour les personnes âgées et pour les malades, et, parallèlement, le refus d'opérer un prélèvement sur les stock-options. Comme nous avons pu le constater la semaine dernière lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, les stock-options sont protégées. Notre proposition de les taxer plus fortement ne correspondait bien entendu pas à la ligne de conduite de cette majorité.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la politique qui est menée ne prend pas la mesure des réels enjeux du moment. Comment voulez-vous que l'on mobilise les Français sur un projet de redressement si on ne leur donne pas, à travers le levier fiscal, les conditions leur permettant d'espérer pour eux-mêmes ou pour leurs enfants une amélioration nécessaire de leur situation ? Ce budget n'apporte aucune réponse dans ce sens. C'est pourquoi nous nous y opposerons.

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