Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 22 novembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le ministre, tel un Sisyphe contemporain, dans la lignée de vos prédécesseurs, vous essayez de réduire, presque d'effacer - en vain, puisqu'il repart à la hausse, passant de 2, 6 % à 2, 7 %, voire plus, du PIB - ce déficit récurrent qui réduit considérablement, voire annule, la force de frappe financière de l'État. Or vous ne semblez pas tout mettre en oeuvre dans ce budget pour atteindre cet objectif.

Certes, le contexte international apparaît particulièrement difficile : le prix du baril de pétrole frôle les 100 dollars, le coût des matières premières connaît une hausse considérable et l'on assiste à l'effondrement des subprimes américaines, dont les conséquences affectent toutes les économies ; la hausse des taux d'intérêts augmente la charge de notre dette et rend votre tâche encore plus difficile.

Ce constat fait, ce budget ne présente pas les caractéristiques de la rupture tant prônée et tant promise. Les méthodes et les chiffres ne varient guère par rapport à l'année dernière.

Le déficit prévisionnel s'établirait à 41, 7 milliards d'euros ; or son montant est déjà supérieur à celui qui a été relevé l'année dernière à la même époque et à celui qui est prévu en exécution pour 2007.

Les dépenses de l'État progressent de 0, 3 point, donc à un rythme supérieur à l'inflation, en dépit de la mise en place d'une norme de dépense à « zéro volume élargie ».

Les sous-budgétisations résistent à la LOLF, à hauteur de 1, 3 milliard d'euros cette année.

La baisse nette annoncée du nombre de fonctionnaires - 22 800 en équivalents temps plein - est en réalité compensée par une hausse de la masse salariale due à la création de nouveaux emplois chez les opérateurs de l'État et par les dépenses de pension.

Alors quid de la rupture ?

Monsieur le ministre, il conviendrait sans doute que le projet de loi de finances soit a priori assis sur les meilleures bases possibles. Or, tout comme l'année dernière, je crains, ainsi que beaucoup d'autres, que votre hypothèse de croissance de 2, 25 % ne soit plus réaliste, en particulier - je le répète - compte tenu des nouveaux paramètres, tels que le pétrole, les matières premières et les taux d'intérêts.

Pouvez-vous expliquer plus précisément vos certitudes lorsque l'INSEE table au mieux sur un taux de croissance de 2 %, tout comme le Bureau d'informations et de prévisions économiques, le BIPE, et la majorité des instituts d'analyse ? Le montant exceptionnellement élevé de la réserve de précaution, 7 milliards d'euros, ne contredit-il pas un tel excès d'optimisme ?

Plus que tout, notre dette continue d'obérer toutes les marges de manoeuvre nécessaires à un choc de croissance. Quel avenir réservons-nous à nos enfants lorsque l'encours de la dette publique atteint 64 % du PIB, soit 1 180 milliards d'euros ? En microéconomie, une entreprise est déclarée en faillite si ses passifs sont deux fois plus élevés que ses actifs. Sachant que l'État dispose de 538 milliards d'euros d'actifs, le Premier ministre avait raison de déclarer que la France est en faillite.

Nos compatriotes ont compris qu'il n'était plus soutenable, économiquement, socialement et moralement, de laisser aux générations futures le soin de corriger les errements auxquels nous avons tous participé. L'état de santé de nos finances est alarmant ; le traitement doit être drastique. Il n'est pas question d'augmenter encore les prélèvements obligatoires, qui figurent déjà parmi les plus élevés de l'OCDE, ou de se satisfaire de la vente des actifs de l'État, opérations par nature non reconductibles.

Nous devons oser dire que seule une réforme profonde de la façon de dépenser sera à même de garantir que l'État continuera à jouer son rôle social en aidant les plus faibles et à servir l'intérêt général. Cela implique au minimum une amélioration structurelle des comptes publics de 0, 5 point de PIB par an jusqu'en 2012.

Comme le souligne notre collègue Joël Bourdin dans son rapport d'information consacré aux perspectives économiques 2008-2012, il s'agit maintenant de « modérer la part des ressources économiques allouées aux dépenses publiques » et de « réduire de façon structurelle la place des dépenses publiques ». D'autres pays l'ont fait. Comme je l'ai déjà exposé à de nombreuses reprises, c'est notamment le cas du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de l'Espagne ou du Royaume-Uni.

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