Monsieur le président, j'ai appris aujourd'hui que notre éminent collègue M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, avait déposé, en 1992, une motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi de finances pour 1993 et que cette motion avait été adoptée. Je me demande au nom de quel principe le groupe communiste républicain et citoyen ne pourrait pas faire de même, d'autant que, nous le savons - inutile d'employer la langue de bois ! -, nous ne serons pas suivis.
Nous ne sommes évidemment pas opposés à ce que les assemblées débattent du projet de loi de finances. L'objet premier de cette motion est de faire en sorte que le présent projet de loi de finances rompe réellement avec les budgets de la précédente législature.
Cette question préalable pose le problème du sens que l'on donne à l'intervention parlementaire dans le débat budgétaire. Dans l'esprit de certains, l'application rigoureuse de la loi organique sur les lois de finances consiste à cantonner les élus de la nation au rôle de gardien du temple de la réduction de la dépense publique, la réalisation d'économies comptables étant réputée synonyme de vertu budgétaire.
Nous considérons que notre mission est plus large et que nous devons, lorsque c'est nécessaire, mettre en question les dispositions fiscales en vigueur.
Pour autant, nous n'avons pas à nous associer plus avant à la révision générale des politiques publiques, dont nous voyons clairement l'objet en lisant le projet de loi de finances pour 2008, en particulier la seconde partie relative aux dépenses et aux crédits des missions des programmes budgétaires.
On oppose le RMI au RMA ; on taille dans le vif des crédits de la culture, mettant ainsi en cause l'existence de la décentralisation culturelle ; on oppose exonérations de cotisations sociales des entreprises et efforts d'insertion professionnelle des personnes les plus éloignées de l'emploi ; on supprime des crédits de la politique de la ville, d'où l'impossibilité de réaliser le programme prévu par la loi dite « de cohésion sociale » ; on ne permet pas l'application concrète du droit au logement opposable, et je vous ai posé à ce sujet, monsieur le ministre, une question à laquelle vous n'avez toujours pas répondu ; on gage le surcoût temporaire de la réforme, onéreuse, de la carte judiciaire en remettant en cause l'aide juridictionnelle ; on prétend prendre partiellement en charge les retraites des cheminots tout en taillant de nouveau dans les crédits de développement des transports collectifs.
Par ailleurs, la progression des aides au logement et du financement de l'action sociale d'État n'est pas à la hauteur des besoins.
Que dire encore de la non-participation de l'État à l'équilibre des régimes sociaux en crise structurelle ? Je pense notamment à la Mutualité sociale agricole, qui affiche un déficit cumulé de 10 milliards d'euros.
Cette logique de réduction constante de la dépense publique est apparemment satisfaisante d'un point de vue comptable. D'ailleurs, le collectif de fin d'année ne traduit-il pas une réduction de plus de 3 milliards d'euros du déficit budgétaire voté en loi de finances initiale ?
Tout ce projet de budget s'appuie en réalité sur la béance des besoins non satisfaits et des dépenses non réalisées. Ces raisons ne peuvent que nous conduire à vous demander, mes chers collègues, d'adopter cette motion par scrutin public.