Intervention de Xavier Darcos

Réunion du 6 novembre 2007 à 10h00
Questions orales — Accueil des enfants de deux ans dans les écoles

Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale :

Monsieur le sénateur, nous connaissons bien ce sujet vous et moi et ma réponse ne vous surprendra guère.

D'abord, je rappellerai que la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 a simplement complété, sans le modifier, l'article L. 113-1 du code de l'éducation, introduit par la loi du 11 juillet 1975, puis modifié par la loi du 10 juillet 1989, l'accueil des enfants âgés de deux ans ayant été étendu aux régions d'outre-mer, ce que les précédentes versions de l'article ne prévoyaient pas.

Loin d'être en contradiction avec la loi de 2005, le décret vient préciser son cadre d'application : la scolarisation des enfants âgés de deux ans est subordonnée non seulement aux capacités d'accueil des classes de maternelle - vous l'avez mentionné, monsieur le sénateur -, mais aussi à certaines priorités, je pense en particulier aux quartiers sensibles. Ainsi, les enfants âgés de deux ans le jour de la rentrée scolaire peuvent être admis à l'école maternelle dans la limite des places disponibles, les enfants de trois ans étant scolarisés en priorité - ils le sont tous, d'ailleurs.

Toutefois, les solutions d'accueil pour les enfants de moins de trois ans ne peuvent consister uniquement en une scolarisation dans les formes traditionnelles. Répondre favorablement à votre demande, c'est-à-dire décider d'accueillir tous les enfants de deux ans et partout sur le territoire, obligerait d'ailleurs à revoir la loi elle-même, monsieur le sénateur.

À dire vrai, mon sentiment sur ce sujet a évolué au cours de ma carrière et s'est fixé petit à petit. Je partage les conclusions du rapport remis en 2003 par la Défenseure des enfants, intitulé L'École, outil de la liberté : elles ne démontrent pas que la scolarisation précoce constitue, dans toutes les situations, un avantage notable par rapport à d'autres modes d'accueil. De même, dans l'enquête Information et vie quotidienne publiée par l'INSEE au mois de septembre 2007, on peut lire que 56 % des adultes de la région Nord - Pas-de-Calais sont entrés à l'école avant trois ans, contre 47 % pour la moyenne nationale. Or c'est dans cette région que les difficultés de maîtrise de l'écrit à l'âge adulte sont les plus importantes.

De même, si une évaluation à l'entrée au cours préparatoire a mis en évidence des effets très légèrement positifs de la fréquentation de l'école avant l'âge de trois ans, ceux-ci concernent non pas les élèves de zone rurale - ceux auxquels vous pensez en tant que sénateur de l'Ardèche - mais seulement ceux qui sont scolarisés en zone d'éducation prioritaire.

Au reste, tous les enfants de deux ans ne sont pas prêts à profiter d'une scolarisation précoce : ils ne savent pas leur nom, ils ne sont pas propres. Je n'insiste pas, car vous connaissez bien ces difficultés, monsieur le sénateur. En outre, les écoles ne sont pas toutes à même de recevoir ces enfants dans les conditions qui permettent de répondre à leurs besoins, qu'il s'agisse de la qualité des locaux et du matériel ou de la présence dans les écoles maternelles d'agents territoriaux spécialisés en nombre suffisant.

Pour toutes ces raisons, on ne saurait considérer la scolarisation des enfants âgés de deux ans comme une obligation pour le système éducatif. Ni la loi ni le décret ne posent cette scolarisation comme un droit, ils l'envisagent seulement comme une possibilité.

S'agissant plus spécifiquement des milieux ruraux, il appartient aux autorités académiques de procéder à des mesures d'aménagement du réseau des écoles à partir de critères objectifs soumis à l'avis des instances de concertation. Les seuils d'ouverture et de fermeture de classes, qui découlent de cette procédure, permettent de déterminer avec précision les ajustements requis tout en intégrant la nécessité de préserver le réseau public d'éducation en milieu rural, comme vous l'avez très justement signalé, monsieur le sénateur.

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