S'agissant de l'amendement n° II-100, sans être complètement convaincu par les arguments de M. le rapporteur général, j'ai été très sensible à l'analyse très fouillée à laquelle il s'est livré. Je dirai simplement que les raisons qui ont conduit à baisser le taux de participation de 10 % à 5 %, pourraient nous conduire à aller jusqu'à zéro, la question étant alors de peser entre inconvénients et avantages.
Pour l'heure, afin de ne pas prolonger inutilement ce débat, je retire cet amendement sans trop d'états d'âme.
J'en ai beaucoup plus sur l'amendement n° II-101 rectifié.
Bien sûr, l'argument ultime consiste à dire que l' »amendement Gournac » a éteint tout débat sur l'ISF pour cette année. C'est un peu : « Circulez, y a rien à voir ! » Cet amendement, qui présente tout de même quelques défauts, a eu l'intérêt d'interrompre le débat, du moins pour ceux qui souhaitaient voir ce débat interrompu... J'ai donc quelques scrupules à le rouvrir, mais je le fais d'une manière très incidente.
Michel Charasse vient de confirmer que le délai de prescription de dix ans avait été retenu un peu par hasard. Je l'ai dit tout à l'heure, lorsqu'on fait le rapprochement avec les droits de succession, il faut garder à l'esprit que, par définition, ceux-ci ne frappent un patrimoine donné qu'une seule fois dans une vie, alors que l'ISF doit être acquitté chaque année.
Il ne faut pas oublier non plus que c'est un impôt déclaratif et qu'il a ainsi un fort aspect psychologique. Songeons à tous ces assujettis potentiels à l'ISF, ceux qui sont à la limite de l'imposition et qu'évoquait le rapporteur général, qui se retrouvent tout à coup de l'autre côté de la « frontière » du fait de l'évolution des prix de l'immobilier à Chamonix ou à Paris. Ils peuvent très bien se dire que, après tout, ils n'ont pas besoin de faire leur déclaration tout de suite, qu'il vaut mieux attendre, etc.
Face à une telle situation, un délai de prescription de dix ans me paraît terriblement pénalisant et il risque d'inciter des gens qui hésitaient à quitter la France à le faire, ou au moins à expatrier leurs capitaux. Or cela est terriblement fâcheux. On est vraiment à cette charnière psychologique qui fait qu'il suffit d'un rien pour que des gens basculent vers l'expatriation.
Je rappelle que tout notre rapport sur l'expatriation des capitaux, des compétences et des entreprises insistait sur cet aspect psychologique : on peut faire toutes les réformes possibles sur les prélèvements obligatoires, mais il suffit d'une toute petite mesure pour décider des gens à partir ou, au contraire, les dissuader de partir et les convaincre de continuer à vivre en France, à développer notre économie avec leurs compétences, leurs talents et leurs capitaux.
C'est donc à contre-coeur que je retire cet amendement, car il permettait d'ouvrir un vrai débat.
Michel Charasse le rappelait, notre actuelle situation fiscale est l'héritage d'années de sédimentation. Nous ne pouvons pas nous en satisfaire et nous ne saurions rester inertes devant l'évasion vers l'étranger de notre épargne, de notre patrimoine, de nos compétences, alors qu'il suffirait d'un rien pour renverser la vapeur.
Il s'agit de l'avenir de notre pays, de sa compétitivité dans un monde qui est devenu ouvert. Eh bien, dans ce monde ouvert, nous-mêmes, ouvrons les yeux !