Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai par la même occasion l'amendement n° II-80, qui porte sur l'article 69 bis, lequel traite du même sujet.
La commission n'est pas favorable à l'amendement n° II-117 rectifié bis. Nous estimons que créer des pénalités supplémentaires, c'est renchérir encore le prix de revient des opérations et faire monter davantage le marché.
En effet, il y a eu une telle demande pour les espaces les plus prisés, notamment dans l'agglomération parisienne, que la pénalité que vous voudriez imposer, monsieur Repentin, pourrait venir encore alimenter cette hausse que l'on peut largement qualifier d'irrationnelle.
La commission des finances a réfléchi sur l'initiative prise par l'Assemblée nationale avec le vote de l'article 69 bis. Nous comprenons bien les raisons pour lesquelles nos collègues députés ont cru devoir remettre en cause très largement le régime fiscal de la profession dite des « marchands de biens ». Cependant, nous n'avons vraiment pas été convaincus.
Il n'est pas certain, de notre point de vue, que la perspective du paiement des droits et taxes de mutation au-delà d'un délai de revente réduit à un an modifierait à ce point l'équilibre économique des opérations dites de « ventes à la découpe » qu'elle conduirait les marchands de biens à renoncer à certaines d'entre elles. Il est plus probable que les professionnels concernés, s'ils choisissaient de ne pas revendre dans le délai d'un an ou s'ils ne pouvaient finaliser leurs opérations dans ce délai, opteraient pour une répercussion du coût des droits de mutation sur l'acquéreur, ce qui serait exactement l'inverse de l'effet recherché.
A la vérité, le terrain fiscal n'est sans doute pas, en l'occurrence, le plus approprié. La question soulevée pourrait éventuellement trouver une réponse plus pertinente dans le cadre du droit des rapports locatifs. Cette question a déjà été examinée à l'Assemblée nationale sans qu'on ait, pour le moment, débouché sur une solution applicable. Une décote de 10 % à 30 % sur le prix d'achat au profit du locataire a été évoquée. Sa mise en oeuvre paraît délicate, mais je crois que c'est plutôt dans ce sens-là qu'il faut s'orienter pour rechercher une solution.
La commission nationale de concertation s'est saisie de la question en vue de formuler des propositions ; celles-ci feront l'objet de négociations entre investisseurs et associations de locataires. Il me semble, à titre personnel, que cette voie est assez prometteuse.
En définitive, si la commission des finances n'est pas défavorable à l'esprit de l'initiative de l'Assemblée nationale, elle n'en estime pas moins que le dispositif n'est pas adéquat dans la mesure où son adoption modifierait brutalement les conditions d'exercice d'une profession sans produire pour autant une détente des prix de l'immobilier.
Je m'interroge sur l'opportunité d'une telle perturbation des règles de fonctionnement du marché de l'immobilier par une mesure de portée générale, qui s'appliquerait dans tous nos départements, alors qu'il s'agit que de résoudre un problème essentiellement francilien, voire parisien. Pourquoi changer le régime fiscal de l'immobilier à partir de situations, certes perturbantes et délicates, mais qui sont loin d'être observées sur tout le territoire national ?
Le délai d'un an voté à l'Assemblée nationale est insuffisant compte tenu de la lenteur des procédures administratives et des conditions de mise en oeuvre des droits de préemption. Ce délai ne permettra pas aux opérateurs d'améliorer l'habitat existant. Il pourrait donc favoriser les opérations purement spéculatives d'achat et de revente sans travaux, ce qui serait en contradiction avec le but visé.
La question sera abordée par la commission mixte paritaire si, mes chers collègues, nous décidons de supprimer l'article. Y a-t-il place pour un compromis entre la position de l'Assemblée nationale et celle qui est préconisée pour l'instant par la commission des finances ? Nous le verrons alors. Sachez en tous cas, mes chers collègues, que le dispositif adopté à l'Assemblée nationale pourrait avoir un « effet boomerang » et se retourner contre les intentions de ses auteurs.
C'est pourquoi, à ce stade, la commission des finances propose la suppression de l'article 69 bis.