Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 6 décembre 2007 à 10h00
Loi de finances pour 2008 — Pilotage de l'économie française

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Pilotage de l'économie française » est la nouveauté de ce projet de loi de finances pour 2008. Elle est majeure, en l'état actuel des choses, tant il est vrai que notre politique budgétaire ne permet ni une allocation efficace des ressources, ni leur redistribution équitable, ni une stratégie macroéconomique de l'État.

Si notre pays ne dispose plus de l'ensemble des leviers budgétaires depuis le traité de Maastricht, celui-ci nous laisse néanmoins une latitude d'action importante. Mais - c'est un point capital - il serait absolument contre-productif d'agir sans tenir compte de ce que font nos voisins européens.

Le principal mal dont souffre notre économie réside aujourd'hui, sans aucun doute, dans une compétitivité très moyenne. Le forum économique mondial nous classait ainsi, en 2006, au dix-huitième rang mondial, en recul de six places. Sont en cause notre déficit public, l'efficacité limitée de notre système éducatif et l'incroyable rigidité de notre marché du travail. Certes, nous sommes restés au même rang en 2007, mais est-ce une consolation ?

Nos compatriotes demandent légitimement à mieux vivre du fruit de leur travail. Or, une hausse des salaires doit absolument s'accompagner de profondes réformes structurelles en faveur de la compétitivité. Rappelons la crise de 1983, lorsque la politique de hausse des coûts avait conduit à une explosion de l'inflation, au creusement abyssal de notre déficit commercial et à trois dévaluations. Aujourd'hui, l'euro fort semble nous protéger, mais, en réalité, il cache les maux qui nous frappent.

Agissons donc sans attendre, monsieur le secrétaire d'État !

Avant tout, la résorption de notre déficit public est en cause. Pourquoi ne pas s'inspirer de nos voisins allemands ? D'un déficit de 2, 5 % en 2005, comparable au nôtre, ils passeront probablement à excédent budgétaire à partir de 2010, voire 2009, selon certains experts.

Depuis vingt-sept ans, aucun Premier ministre français n'a présenté devant le Parlement un budget en équilibre. Quelles raisons pouvez-nous donner, monsieur le secrétaire d'État, pour que l'on puisse croire que cela va changer ?

Selon le programme de stabilité 2009-2012, transmis à la Commission, l'objectif de réduction de la dette publique a encore été modéré pour viser 63, 2 % en 2009 et 60 % en 2012. Pourquoi ? Cette politique est très négative vis-à-vis tant de nos partenaires que de nos compatriotes, l'État montrant en la matière un exemple déplorable.

La littérature est abondante et tous les avis d'experts convergent pour estimer que notre dette ne sera plus soutenable à terme.

Je citerai quelques exemples, pour mémoire.

En 2004, le rapport Camdessus préconisait notamment une décrue des effectifs de fonctionnaires, la généralisation de la contractualisation dans le secteur public ou l'adoption d'une approche budgétaire contra-cyclique ; en 2005, le rapport Pébereau recommandait, quant à lui, de stabiliser les dépenses de l'État en euros courants, d'affecter intégralement les recettes exceptionnelles au désendettement, ou encore de gager une dépense nouvelle par la suppression à due concurrence d'une autre dépense ; enfin, dans son récent rapport sur les perspectives économiques 2008-2012, notre collègue Joël Bourdin en appelle, de son côté, au ciblage d'une croissance potentielle plus élevée tout en resserrant la norme des dépenses publiques.

Monsieur le secrétaire d'État, rationaliser les postes de dépenses de l'État est impératif. La fonction publique représente 25 % de la population active française, contre 16 % en moyenne dans les pays de l'OCDE. De 1990 à 2001, ses effectifs sont passés de 3, 9 millions à 4, 7 millions d'agents, soit une hausse de 23 %, supérieure de neuf points à celle du nombre des salariés du privé. Enfin, en 2003, la rémunération moyenne nette d'un agent public était supérieure de 14 % à celle d'un salarié du privé, à fonctions équivalentes.

Cet aperçu donne le ton de la nécessité d'une réforme de l'État. Mettons en place une gouvernance déterminée et efficace.

Que s'est-il fait, ailleurs ?

En 2000, la Suisse a supprimé le statut de fonctionnaire pour y substituer un contrat individuel de droit public, fondé sur l'efficacité et la mobilité de l'agent, ouvrant la possibilité d'un licenciement, en contrepartie d'une meilleure rémunération. Les effectifs sont ainsi passés, à qualité constante, de 140 000 en 1996 à 110 000 en 2004.

Dans les années quatre-vingt-dix, la Suède a diminué de moitié ses effectifs de fonctionnaires. Ceux-ci sont aujourd'hui employés sous contrat de droit privé avec pour objectif la gestion la plus efficace des services de l'État, ce qui, au final a conduit à une amélioration de la qualité de ces services.

Monsieur le secrétaire d'État, la discussion des crédits de la mission «Pilotage de l'économie française » ne revêt malheureusement pas la dimension qui devrait être la sienne. Les montants engagés - 392, 6 millions d'euros - paraissent bien faibles comparés à la masse des quarante-huit missions de l'ensemble du budget pour 2008. Ils financent pourtant des services essentiels au redressement de notre économie, destinés à mettre en place une véritable révolution culturelle élaborant la stratégie qu'il nous faut adopter.

Nous ne pouvons plus nous contenter aujourd'hui d'une politique budgétaire d'accompagnement, aux marges de manoeuvre dérisoires. Seule une politique ambitieuse, mais aussi courageuse, qui, si elle est sans doute difficile à mettre en place, n'en est pas moins vitale, pourra remettre la France sur la voie de la prospérité.

Vous êtes convaincu, monsieur le secrétaire d'État, de l'efficacité et de l'équité d'une politique sociale libérale. Je souhaite que vous en soyez l'initiateur. §

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