J'ai déjà attiré l'attention de la Haute Assemblée et celle du Gouvernement, incarné alors par Dominique Bussereau, sur cette question : des chefs d'entreprise sont obligés de rester en fonction, car, s'ils quittent leur poste, ils voient leur patrimoine d'entreprise et leurs biens professionnels soumis à imposition. Un certain nombre de Français se demandent donc s'ils ne commettent pas un délit en entreprenant ; ils se posent la question de savoir s'il n'existe pas une sorte de délit tacite de création et de développement d'entreprise.
Il faut savoir que, lorsque vous avez créé ou développé une entreprise, vous n'avez plus la possibilité de partir à la retraite. En effet, le fait de partir à la retraite vous soumet à l'impôt sur le patrimoine et sur l'épargne, et oblige l'entreprise à servir des dividendes suffisants pour payer cet impôt ; vous privez dès lors l'entreprise de tous fonds propres et vous lui interdisez de se développer. Nos concurrents savent que les Français ont une législation qui empêche les entrepreneurs de prendre leur retraite, ce qui les ravit et, pour notre part, nous faisons semblant de ne pas nous en rendre compte.
Monsieur le ministre, votre prédécesseur m'avait vivement encouragé à travailler sur ce dossier, m'indiquant qu'il y travaillerait aussi de son côté. Je sais que vous vous en êtes préoccupé, même si votre agenda ne vous a sans doute pas permis d'aller au terme de votre réflexion. Je tiens simplement à souligner deux cas qui doivent être traités avec une extrême urgence.
Tout d'abord, il s'agit de dirigeants qui, à l'âge de la retraite, restent dans l'entreprise, non pas fictivement, parce que ce serait fiscalement répréhensible, mais alors qu'ils ne le souhaitent pas, pour que leurs titres ne soient pas soumis à l'ISF. S'ils y sont assujettis, cela signifie, étant donné que la majeure partie de leur patrimoine est concernée, que l'entreprise devra distribuer à l'extrême pour payer l'impôt.
Ensuite, il s'agit des entreprises qui se restructurent pour se développer ; elles accueillent d'autres associés ou entrent dans un processus plus large, et les associés voient leur capital se diluer.
Lorsque l'on connaît vos idées, monsieur le ministre - et Dieu sait si vous les assumez ! -, on ne peut pas penser que vous acceptiez le fait que, dans notre pays, entreprendre ou développer une entreprise puisse être considéré comme un délit. Par ailleurs, vous ne pouvez pas non plus faire en sorte que ceux qui ont développé leur entreprise depuis cinquante ans soient assignés à rester en fonction contre toute logique. Or, c'est ce qui se passe actuellement.
L'amendement n° 28 rectifié vise à résoudre ce problème. Eu égard à la démographie des responsables d'entreprise et des dirigeants de PME sur notre territoire, il est urgentissime de mettre en place ce nouveau dispositif ; à défaut, nos entreprises seront cédées, les centres de décisions s'éloigneront de nos provinces et nous perdrons des emplois.