Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, mon rappel au règlement, qui se fonde sur l'article 36 de notre règlement, a trait aux récentes déclarations de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, ici présent, qui imputent l'échec scolaire à la méthode globale d'apprentissage de la lecture.
Cette méthode serait l'une des causes d'« une véritable épidémie de dyslexie ».
Au-delà du fait que, en grande partie, l'ensemble de la communauté éducative s'accorde à dire que cette méthode est rarement utilisée, vous outrepassez votre fonction, monsieur le ministre, en inscrivant dans le marbre de la loi une opinion qui vous est propre.
En effet, sur quelles études vous appuyez-vous ? Non pas sur l'avis des orthophonistes, comme vous le prétendez, puisque la Fédération nationale des orthophonistes - qui est, je vous le rappelle, le principal syndicat de cette profession - s'est inscrite en faux contre votre assertion.
Peut-être vous fondez-vous sur les travaux du Haut Conseil de l'éducation, qui est également chargé de formuler des propositions quant à la pédagogie. Je ne le pense pas, dans la mesure où cette institution, nouvellement créée - elle a été mise en place au début du mois de novembre -, travaille actuellement sur le contenu du socle commun voté au mois de mars dernier dans la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, dite « loi Fillon ». En outre, elle doit déjà faire face à sa première démission.
Peut-être vous appuyez-vous sur les travaux et avis du Haut Conseil de l'évaluation de l'école. Là encore, je ne le pense pas, puisque, à ce jour, aucun des avis de ce Haut conseil ne traite de ce sujet.
Force est donc de constater, monsieur le ministre, que vos déclarations s'apparentent plus à des considérations politiciennes, voire démagogiques, qu'à une réelle volonté de diminuer le taux d'échec scolaire.
A vous croire, la méthode syllabique serait la « panacée » contre l'échec scolaire. C'est un discours totalement partiel et biaisé : non seulement il fait du cours préparatoire la classe « où tout se joue » - alors que, souvent, les prémices de l'échec apparaissent dès la grande section de maternelle -, mais surtout il occulte tous les facteurs qui sont en amont de l'échec scolaire, à savoir la situation sociale des élèves, le manque de moyens accru des écoles, la pénurie d'enseignants
Monsieur le ministre, laissez aux spécialistes et aux enseignants le soin de faire leur travail. L'avenir de nos jeunes est un enjeu bien trop précieux, bien trop vital, pour que vous vous permettiez de dogmatiser vos opinions.
Dois-je vous rappeler que c'est à la loi d'imposer, non au gouvernement ? Une loi qui doit être issue d'une longue concertation avec les partenaires concernés, et suivie d'un profond et serein débat au Parlement, débat que votre gouvernement n'a eu de cesse de nous voler ; nous en avons la confirmation avec ce texte. Le passage en force est, malheureusement, devenu une pratique courante de votre gouvernement !