Je tiens tout d’abord à préciser, afin d’éviter tout malentendu, que, voilà un instant, lors du vote sur l’amendement n° 53, j’ai levé la main avec un peu trop de hâte : en fait, nous nous abstenons. En effet, à partir du moment où un service est ouvert à la concurrence, créer une autorité de régulation est une nécessité. Par ailleurs, nul ici n’ignore ce que nous pensons de l’ouverture à la concurrence des services internationaux de transport de voyageurs.
J’en viens à l’article 4.
L’ouverture du secteur ferroviaire à la concurrence impose la mise en place d’un « organisme de régulation et de contrôle ».
En France, ce rôle était jusqu’à présent confié au ministre des transports, assisté par la mission de contrôle des activités ferroviaires. Il est prévu, dans le présent projet de loi, la mise en place d’une autorité administrative indépendante : la commission de régulation des activités ferroviaires, ou CRAF. Cette autorité pourra instruire des plaintes, lancer des enquêtes et des investigations, et infliger des sanctions comme une interdiction temporaire d’accès et/ou une amende pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires de l’opérateur.
Ce texte était attendu depuis longtemps et a pu être, sous certains aspects, l’arbre qui cache la forêt : en effet, tous les regards extérieurs se sont focalisés sur la création de la CRAF et certains de nos interlocuteurs en avaient presque oublié les autres articles du projet de loi.
Nous n’aurons pas beaucoup d’amendements à proposer en dehors de ceux qui visent à apporter des modifications mineures, destinées à améliorer le fonctionnement de cette nouvelle structure.
Je souhaiterais toutefois revenir sur l’un de ses rôles fondamentaux : comme cela est prévu aux termes du nouvel article 17-2 de la LOTI, la loi d’orientation sur les transports intérieurs, article auquel nous nous sommes opposés – je viens de rappeler que nous étions totalement défavorables à l’ouverture à la concurrence des services internationaux de transport de voyageurs –, l’Autorité veillera au respect des conditions ouvrant droit au cabotage pour les entreprises ferroviaires proposant du transport international de voyageurs : elle devra vérifier que les dessertes intérieures sont réellement accessoires et ne viennent pas perturber l’équilibre des contrats existants.
Cependant, je tiens à rappeler que ce sont donc les critères définis par décret qui seront déterminants. Sur ce point, le texte nous paraît bien flou.
Il me serait ainsi agréable d’avoir une idée du type de dessertes susceptibles de porter préjudice à certains contrats, de même qu’il serait important d’avoir une idée des unités de mesure qui permettront de définir le caractère accessoire d’une desserte : le voyageur ? Le nombre de voyageurs par kilomètre ? Le rapport entre le « nombre de voyageurs sur desserte interne » et le nombre de voyageurs total ? Le rapport entre le chiffre d’affaires généré par la desserte interne et le chiffre d’affaires global ?
Monsieur le secrétaire d’État, ces questions font-elles l’objet de travaux aujourd’hui ?
Enfin, si, à l’exception de quelques détails, cette partie du texte est celle qui pose le moins de problèmes puisque, dans un contexte ouvert à la concurrence, l’autorité de régulation est un passage obligé et une mesure attendue par les acteurs du secteur, deux questions restent posées.
Peut-être les régions pourraient-elles néanmoins se voir attribuer un rôle dans la nomination d’une partie des membres de la CRAF ? Je ne vais pas jusqu’à demander qu’un membre de l’Association des régions de France siège au sein de cette instance.
De même, les pouvoirs de la CRAF n’auraient-ils pas pu être mieux calibrés pour résoudre certains litiges entre gestionnaires d’infrastructures ? Nous craignons surtout pour ses capacités d’investigation, puisqu’elle sera financée directement par le budget de l’État et non par les redevances, ce qui, vous en conviendrez, ne facilitera pas son autonomie. On parle d’un budget de 8 millions d’euros. Nous souhaiterions que ces débats vous donnent l’occasion de le confirmer, monsieur le secrétaire d’État.