Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 29 avril 2008 à 16h00
Mobilité et parcours professionnels dans la fonction publique — Article 10

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

L’article 10 est de loin celui qui focalise toutes les attentions, toutes les crispations, puisqu’il prévoit de légaliser le recours aux salariés intérimaires par les organismes publics pour pourvoir rapidement des emplois temporairement inoccupés ou pour faire face à un besoin ponctuel.

Le Gouvernement, pour justifier le recours à l’intérim, veut « éviter la reconstitution d’un vivier de précaires au sein de la fonction publique ». Cet argument ne manque pas de sel : soit le Gouvernement essaie de nous faire croire que les salariés intérimaires ne sont pas des salariés précaires – ce qui est fort douteux, il suffit de se rendre dans les agences d’intérim – ; soit il veut nous faire croire qu’embaucher un salarié intérimaire est une solution moins précaire que de recruter un fonctionnaire. Faut-il comprendre que la situation des fonctionnaires n’est pas si confortable que cela ? Il est vrai que c’est parfois le cas…

J’aimerais que le Gouvernement trouve un meilleur argument que celui-là pour expliquer une situation qui est, de toute façon, injustifiable et inacceptable. Les hôpitaux ont certes recours aux intérimaires pour faire face à la pénurie de personnel. Mais est-ce une raison pour généraliser l’intérim ? La solution ne consiste-t-elle pas plutôt à augmenter le nombre de recrutements d’agents titulaires hospitaliers ? Évidemment, pour le Gouvernement, il n’en est pas question, puisque l’objectif est justement de supprimer des postes de fonctionnaires. C’est d’ailleurs en quoi cet article s’inscrit pleinement dans la logique de la révision générale des politiques publiques.

Outre le fait qu’elle a vocation à faire économiser des postes, cette disposition traduit également l’idéologie du Gouvernement qui consiste à banaliser le contrat dans la fonction publique et à dénaturer le statut. Or remplir une mission de service public n’est pas la même chose que servir les intérêts d’une entreprise privée. Banaliser le recours à des intérimaires, alors que ceux-ci sont traditionnellement employés pour des missions relativement courtes dans des entreprises très diversifiées, tend à ancrer dans les esprits que remplir une mission de service public est un emploi comme un autre.

Les intérimaires n’auront pas la préoccupation de satisfaire l’intérêt général, la recherche de l’efficacité sociale puisqu’ils n’auront pas vocation à rester dans la fonction publique. Et pourtant, pendant le court temps qu’ils y passeront, c’est bien la qualité du service public qui sera en jeu.

Nous sommes face à des intérêts totalement contradictoires. Vouloir imposer l’intérim nous semble donc simplement idéologique. Ce n’est d’ailleurs pas sans lien avec la volonté d’externaliser de plus en plus de missions de service public. C’est aussi dans la lignée de ce que préconise le rapport Silicani, qui propose de construire une fonction publique de métiers et vise à substituer la logique du marché à celle du service public.

M. le rapporteur n’a pas suivi la logique du Gouvernement. Il avait proposé un amendement de suppression, que la commission des lois a voté. Qu’en est-il aujourd’hui ? Allons-nous poursuivre le travail fait en commission…

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