Intervention de Michel Billout

Réunion du 2 mars 2006 à 10h00
Égalité des chances — Article 4 quater

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Cet amendement vise à supprimer l'article 4 quater.

Au cours de son intervention, mon ami et collègue Roland Muzeau a rappelé en quoi cet article met en cause, directement et indirectement, un certain nombre de droits des travailleurs.

Une telle disposition, au regard du recours croissant des entreprises à la sous-traitance, aura des conséquences très graves dans les entreprises, qui perdront, de fait, le droit à élire des représentants ou encore le droit à disposer d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, CHSCT, ou enfin d'intégrer des personnes handicapées dans le monde de l'entreprise.

Ce sont là de nouvelles discriminations qui sont tout à fait inacceptables et, je pense, de nature à provoquer l'indignation de M. le rapporteur !

Une telle mesure n'a donc certainement pas à être prise par le biais d'un cavalier législatif. Elle devrait, au contraire, faire l'objet de discussions préalables avec, ou plutôt, entre les partenaires sociaux. N'était-ce pas d'ailleurs le principe posé par la loi Fillon du 4 mai 2004, dans sa partie consacrée au dialogue social ? Mais là encore, entre le discours et les actes...

Par ailleurs, on peut se demander en quoi l'exclusion de salariés dans la prise en compte des effectifs constitue un pas vers l'égalité des chances ? D'un point de vue purement juridique, non seulement cette mesure va à l'encontre de toute la jurisprudence existante sur le sujet, mais elle risque, en outre, de conduire à des situations aberrantes.

Plus précisément, en modifiant l'article L. 620-10 du code du travail, comme le prévoit le présent projet de loi, vous vous mettez en contradiction avec d'autres dispositions de ce même code.

Par exemple, l'article L. 422-1, dans son deuxième alinéa, dispose : « Les salariés d'entreprises extérieures qui, dans l'exercice de leur activité, ne se trouvent pas placés sous la subordination directe de l'entreprise utilisatrice peuvent faire présenter leurs réclamations individuelles et collectives concernant celles des conditions d'exécution du travail qui relèvent du chef d'établissement par les délégués du personnel de cet établissement dans les conditions fixées au présent titre. »

Ainsi, les délégués qui seraient amenés à présenter les revendications de certains personnels disposeraient de moyens affaiblis, puisque ces personnels ne seraient plus comptabilisés pour la détermination du nombre et des prérogatives des délégués !

Enfin, la mesure proposée revient à annuler la jurisprudence de la Cour de cassation qui, depuis 2000, interprète très clairement la portée de la phrase « mis à disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure ». Je vous livre un court résumé des principaux arrêts ayant marqué cette construction.

L'arrêt n° 98-60440 du 28 mars 2000 indique qu'il importe peu que les salariés en question soient ou non sous la subordination de l'entreprise utilisatrice.

L'arrêt n° 00-60252 du 27 novembre 2001 indique qu'il importe peu que les entreprises extérieures réalisent « des prestations pour un travail réalisé en toute indépendance, avec des moyens humains et matériels utilisés sous leur exclusive responsabilité ».

L'arrêt n° 03-60125 du 26 mai 2004 soutient la prise en compte de tous les salariés mis à disposition participant aux activités nécessaires au fonctionnement de l'entreprise utilisatrice, cette participation n'étant pas « restreinte au seul métier de l'entreprise ou à la seule activité principale de celle-ci ».

Enfin, l'arrêt n° 05-60124 du 10 janvier 2006 apporte la confirmation des précédents arrêts dans un cas où les entreprises extérieures intervenaient « uniquement dans le cadre de contrats de sous-traitance dont l'objet se limitait à la réalisation d'une prestation ».

C'est pourquoi, contre ces nouvelles discriminations, je vous demande, mes chers collègues, de voter pour la suppression de cet article.

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