Intervention de Bernard Vera

Réunion du 2 mars 2006 à 15h00
Égalité des chances — Article 6

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à en croire certains, le principe des zones franches urbaines, appliqué depuis l'entrée en vigueur de la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville de novembre 1996, constituerait l'alpha et l'oméga des politiques de développement économique et de création d'emplois dans les zones urbaines sensibles.

La vitalité des zones concernées serait patente et les résultats largement à la hauteur des attentes exprimées lors du débat de 1996, à tel point d'ailleurs que le fait de discuter la pertinence de l'outil - c'est-à-dire la défiscalisation et l'allégement des cotisations sociales - procéderait pratiquement du mauvais goût ou de la pure critique spéculative de ce qui serait une composante incontournable du paysage économique et social du pays.

La vérité est sans doute entre les deux : nous rejetons par principe la condamnation sans appel, encore que nous nous interrogions sur la pertinence des outils de financement choisis. Cependant, nous ne versons pas, non plus, dans l'optimisme béat et le constat d'une hypothétique réussite des zones franches dont les contours sont, hélas, passablement impalpables.

Les zones franches urbaines sont-elles un instrument permettant de faire reculer le chômage de manière significative dans les quartiers ? On peut se le demander à la lecture des éléments fournis par le rapport de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles qui nous indique qu'entre 2003 et 2004 le taux de chômage a progressé, dans les zones franches urbaines, de 19, 6 % à 22, 1 % de la population active.

Cette progression du nombre des sans-emploi dans les zones franches urbaines montre au moins une chose : c'est pour des raisons exogènes que le niveau de l'emploi de la population résidente est plus ou moins important et que l'aide à la création d'emplois grâce aux incitations existantes ne fait pas le compte.

Les exemples sont multiples en la matière, mais le fait est qu'il suffit sans doute à quelques groupes ou grandes entreprises de mettre en oeuvre un plan social pour aboutir à créer une déperdition d'emplois parmi les résidents d'une zone franche.

Comment expliquer la persistance d'un taux de chômage nettement plus élevé que toutes les moyennes nationales pour les travailleurs et travailleuses ayant dépassé les vingt-cinq ans, et le fait que la hausse continue du chômage dans les zones sensibles soit pleinement liée à celle des pertes d'emplois pour ces catégories ?

Les discriminations diverses pèsent également dans la situation de l'emploi. L'obtention d'un diplôme supérieur, si elle permet de trouver plus aisément un emploi de manière générale, n'empêche pas les jeunes résidents des zones franches de souffrir d'un taux de chômage important, qui appelle des solutions d'une autre portée que celles qui nous sont aujourd'hui proposées.

De fait, le dispositif des zones franches urbaines montre, depuis son instauration, ses limites. S'il peut offrir plusieurs dizaines de milliers d'emplois, il ne parvient pas, dans les faits, à pallier les problèmes essentiels et singulièrement ceux qui procèdent de la jeunesse de la population des quartiers concernés.

Dans un pays où l'on ne crée pas assez d'emplois, et particulièrement d'emplois qualifiés, en raison de la course obstinée à la rentabilité financière, on ne peut durablement créer les conditions de la résolution des difficultés professionnelles des résidents des quartiers sensibles.

Voilà les quelques premiers points que nous ne pouvions que soulever à l'occasion de la discussion de cet article.

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