Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, l'article 9 du projet de loi porte sur le volet « social », si l'on peut dire, du dispositif des zones franches urbaines puisqu'il concerne directement les mesures destinées à l'exonération des cotisations sociales patronales normalement dues par les entreprises installées sur ces territoires.
Dans la pratique, cette mesure mobilise aujourd'hui 339 millions d'euros de ressources publiques et il convient par ailleurs de souligner d'emblée que le coût induit par la création de quinze nouvelles zones franches dans le cadre du présent texte est estimé à 20 millions d'euros.
Les exonérations de cotisations sociales dont il est question s'appliquent, comme chacun le sait, pour l'ensemble des salaires inférieurs à 1, 4 SMIC, alors même que les dispositions antérieurement en vigueur portaient sur des rémunérations inférieures à 1, 5 SMIC.
De fait, selon les paramètres actuellement appliqués, 68 600 emplois ont été couverts par l'exonération en 2004 et les prévisions font état, à court terme, soit d'ici à la fin de cette année, de 88 400 emplois.
Si l'on procède à une estimation du coût unitaire pour chaque emploi, on aboutit, pour 2004, à une dépense de 3 935 euros et, pour 2006, à une prévision de 3 835 euros, c'est-à-dire un montant proche malgré le recadrage de la mesure.
Toutefois, comme le souligne à juste titre le rapport 2005 de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles : « À la fin de l'année 2004, environ 13 500 établissements bénéficient d'une exonération des cotisations sociales patronales du fait de leur implantation dans l'une des 85 zones franches urbaines : ils sont 10 000 à 11 000 dans les 44 ZFU de première génération et 3 000 dans les 41 ZFU de deuxième génération. Cette exonération de charges sociales concerne 68 600 salariés. La mise en place des ZFU de deuxième génération vient prendre le relais des ZFU de première génération où les effectifs salariés exonérés sont en baisse depuis 2001. En effet, les établissements déjà présents en 1997 ne bénéficient plus que d'une exonération partielle : les exonérations du dispositif ZFU sont moins attractives et certaines optent pour les dispositifs généraux d'allégement de charges sociales. »
Ces indications appellent plusieurs observations.
D'une part, le coût pour le budget de l'État des exonérations de cotisations sociales est finalement relativement élevé. Un coût unitaire par emploi proche de 4 000 euros, c'est-à-dire près de 20 000 euros sur les cinq ans de déroulement des procédures, pourrait fort bien être mis en balance avec un dispositif d'avance en capital des nouvelles entreprises en zone urbaine sensible.
Quand on sait que l'on peut créer une SARL avec un capital initial de 7 500 euros ou une SA avec un capital initial de 37 500 euros, on peut presque se demander pourquoi on ne met pas en oeuvre, en lieu et place de la mesure concernée, un dispositif d'avance remboursable sans intérêts qui pourrait faciliter l'émergence des initiatives des résidents des zones urbaines sensibles.
D'autre part, l'évaluation figurant dans le bleu de la mission « Ville et Logement » sur le coût des exonérations de cotisations sociales occulte donc les choix de gestion opérés par les entreprises qui préfèrent, dans les faits, passer au régime général des allégements de cotisations, le dispositif Fillon dont le périmètre est strictement identique et le caractère permanent clairement affirmé.
Ensuite, le choix des exonérations de cotisations sociales plafonnées à un certain niveau de rémunération pose la question récurrente de la qualité des emplois et des salaires dans les entreprises implantées en zone franche urbaine.
Comme tous les rapports disponibles le prouvent, 21 900 des 90 500 salariés des établissements éligibles aux exonérations de cotisations sociales ne sont pas couverts par le dispositif. Cela signifie en clair que les trois quarts des salariés des entreprises implantées en zone franche perçoivent une rémunération inférieure à 1, 5 SMIC, une proportion autrement plus importante que celle qui, de manière générale, existe dans notre pays. Ce sont donc clairement des emplois sous-rémunérés qui sont offerts par les entreprises des zones franches urbaines.
Est-ce là la marque du succès de la revitalisation économique des quartiers ? L'argent public doit-il servir à développer encore et toujours des activités économiques s'appuyant sur les bas salaires et l'absence de reconnaissance de la qualification des salariés ? Ce sont ces questions qui sont au coeur du dispositif de l'article 9, dont nous allons entamer la discussion.