Nous tenons à ajouter un tel dispositif, parce qu’il nous semble que la question est posée depuis des années. La discussion que nous avons, celle qui a eu lieu à l’Assemblée nationale et l’étude des textes nous montrent que c’est une nécessité.
On ne peut pas, sur certaines questions, avoir une télévision publique qu’on domine et une télévision privée qu’on libère sans rivages. Les 98, 5 % de Français qui regardent l’une ou l’autre constituent un fait de société ; la télévision a des rapports avec la population, avec la société, et on n’en discute nulle part autrement que partiellement.
Il est important de nommer cette responsabilité, qui a déjà une longue histoire. En vérité, elle est née à la Mutualité en 1985, au cours d’un meeting bourré d’artistes, où Michel Mitrani, un grand réalisateur de télévision aujourd’hui décédé, appelait à inventer une alternative française aux défis de l’audiovisuel.
Lors des États généraux de la culture, en 1987, qui ont réuni des milliers d’artistes – nous étions 7 000 au Zénith, et 3 000 dehors, mêlés au public –, a été lancée une déclaration des droits de la culture qui réclamait la mise en œuvre d’une responsabilité publique qui serait la loi du secteur public et qui constituerait des mesures d’intérêt général que devrait respecter le secteur privé.
Depuis, l’idée a cheminé. La loi de 1988 a été l’occasion d’un débat important au Sénat ; notre ancien collègue Charles Lederman en dressait l’alphabet. J’ai évoqué ce matin la loi de 2000 et les missions rédigées par Catherine Tasca, qui commençaient à mettre cette idée en forme.
Je voudrais citer de nouveau l’article intitulé « Pour une télévision responsable », paru avant-hier dans et signé de Philippe Meirieu, professeur à l’université Lumière-Lyon II. Ce texte est soutenu par des organisations de parents d’élèves de l’école publique telles que la FCPE et la PEEP, par la Ligue de l’enseignement, par Éducation et devenir, par les Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active, les CEMEA, et par le SGEN-CFDT. Il indique qu’il est temps d’étudier le problème des relations entre la télévision et la société.
Quelle hypocrisie quand on donne tout au secteur privé, sans avoir le courage de créer des responsabilités ! Ils font ce qu’ils veulent. On dit aux acteurs de s’entendre, alors ils s’entendent, dans un document qui est d’ailleurs illisible, y compris pour la majorité des membres de ces organisations.
Il en résulte essentiellement plus d’obligations pour le secteur public et moins pour le secteur privé. Un arrangement de chiffres a permis d’obtenir la signature de M6, évoquée par Mme Albanel ce matin. C’est un texte de compromis au plus bas niveau, remettant en cause des choses qui étaient acquises.
Il est donc plus que temps de mettre en avant une responsabilité publique et nationale. C’est pourquoi nous proposons d’introduire cet article. Il aidera, nous l’espérons, à franchir cette nouvelle étape qui, elle seule, sera historique.
Pourquoi ne pas organiser au Sénat, au printemps, des états généraux de la télévision et de la société françaises, qui ne seraient coupés ni de l’Europe ni du monde, qui nous permettraient de pousser loin la réflexion et de revenir sur ce texte que l’on nous dit historique mais qui n’apporte que des déboires potentiels et d’ores et déjà visibles à l’œil nu ?