Intervention de Dominique Bussereau

Réunion du 8 février 2006 à 15h00
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission

Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes aujourd'hui réunis pour examiner les conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi relative aux obtentions végétales déposée par Mme Brigitte Bout, à qui M. le rapporteur a rendu un hommage auquel je m'associe bien volontiers, et par M. Jean Bizet lui-même qui, depuis fort longtemps, se préoccupe de ces sujets.

Ce texte fait naturellement suite à l'adoption à une très large majorité par la Haute Assemblée, la semaine dernière, du projet de loi relatif aux obtentions végétales et modifiant le code de la propriété intellectuelle et le code rural.

Ainsi que l'avait alors fait remarquer M. Bizet, au nom de la commission des affaires économiques, les retards pris dans le calendrier parlementaire ne permettent pas d'envisager une promulgation de cette loi avant le 6 mars. Or c'est à cette date qu'arrivent à échéance certains droits, aux conséquences économiques très importantes, d'obtention de variétés végétales.

C'est la raison pour laquelle la présente proposition de loi, dans le droit fil du projet de loi adopté la semaine dernière, reprend les dispositions qui permettront de prolonger de cinq ans la durée de protection des obtentions végétales, tant pour les variétés inscrites que pour celles qui le seront à l'avenir.

Le débat de la semaine dernière et mon récent déplacement en Auvergne à vos côtés, monsieur le président - je pense, notamment à la visite d'IMAGRIN près d'Arion - m'ont permis de constater à quel point il était important d'accorder à nos entreprises de sélection végétale les mêmes moyens que ceux dont disposent leurs concurrents à l'étranger. En effet, c'est toute une filière qui est concernée, de la recherche à la transformation agro-alimentaire, en passant, naturellement, par la production agricole.

Je rappellerai simplement à la Haute Assemblée la place qu'occupe la France en matière de sélection végétale. C'est ainsi que l'INRA est la deuxième institution mondiale pour les recherches en sciences des plantes ; quant à la « profession semencière », peu connue, elle regroupe plus d'une centaine d'établissements de recherche « obtenteur », quelque 300 établissements de recherche, 30 000 agriculteurs multiplicateurs de semences et 2 000 distributeurs.

La sélection végétale est aussi un enjeu en termes d'activité économique, puisque la production s'élève à 800 millions d'euros, dont 180 millions d'euros pour les exportations, 7 000 emplois étant concernés au total.

Je soulignerai également que, à la différence du brevet que défendent les Anglo-saxons, le certificat d'obtention végétale de l'UPOV concilie protection, sécurité des échanges entre sélectionneurs et incitation à l'innovation. En effet, l'autorisation de l'obtenteur pour la mise au point de nouvelles variétés ou pour les actes accomplis à titre expérimental n'est pas exigée.

Pour l'ensemble de ces motifs, qui engagent l'avenir de notre filière végétale et un pan de notre recherche, je souhaite que le texte dont nous discutons aujourd'hui soit adopté par la Haute Assemblée puis par l'Assemblée nationale.

Vous l'aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes également tenus à une obligation de résultats en termes de délai. Naturellement, monsieur le rapporteur, j'engagerai la consultation du Conseil d'État afin que le décret R623-56 relatif à la durée de protection soit modifié et tienne compte des nouvelles durées maximales autorisées par le présent texte, lorsqu'il sera effectivement devenu loi.

Toutefois, madame Bout, l'amendement que vous proposez présente l'intérêt d'introduire dans la loi des durées de protection différentes selon les espèces végétales ; s'il est adopté, l'allongement des délais de protection sera effectif dès la promulgation de la loi.

Le texte voté la semaine dernière par le Sénat sera amendé en conséquence lors de son examen par l'Assemblée nationale. Son parcours législatif pourra ainsi se poursuivre dans des délais raisonnables. Il sera promulgué avant la fin de la session parlementaire, puisqu'il accorde également un cadre légal à la pratique des semences de ferme.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, soixante États - dont la France - et l'Union européenne en tant que telle sont membres de l'Union internationale pour la protection des obtentions végétales. La convention de 1991 a été ratifiée par trente-six de ces États. La France l'entérinera à son tour prochainement, après le vote par l'Assemblée nationale du projet de loi de ratification que vous avez déjà adopté.

Les conclusions de la commission des affaires économiques qui vous sont soumises aujourd'hui permettent de surmonter une contrainte de temps afin de protéger nos entreprises de sélection végétale, lesquelles doivent disposer des mêmes moyens que leurs concurrentes.

L'innovation est l'une des clés de la compétitivité de nos filières agricoles comme du respect de l'environnement, et elle contribue à la biodiversité. C'est pourquoi je ne doute pas que vous vous attacherez, en adoptant les conclusions du rapport de la commission, à donner à ce secteur de notre économie, et plus largement à la « ferme France », les moyens de poursuivre sa croissance.

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