Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre excellent collègue Henri Torre, rapporteur spécial de la commission des finances, ayant parfaitement explicité les crédits de la mission « Outre-mer », je me limiterai à quelques considérations au nom de la commission des lois.
Tout d'abord, nous pouvons noter que l'effort global de l'État en faveur de l'outre-mer est relativement stable, en dépit d'une conjoncture portant aux économies, avec un accent particulier sur l'emploi, dont on mesure déjà les améliorations obtenues, sur le logement social pour lutter contre l'habitat insalubre et sur le développement des collectivités territoriales.
Ce budget traduit l'engagement concret et soutenu de l'ensemble des pouvoirs publics en faveur de l'outre-mer et son écoute des élus de l'outre-mer. On peut donc s'en féliciter.
En revanche, nous sommes encore loin du compte en matière de transparence, qui est pourtant l'un des objectifs des nouvelles dispositions budgétaires.
Non seulement la mission « Outre-mer » ne représente qu'environ 15 % du total des crédits consacrés aux ultra-marins, mais les documents budgétaires sont loin d'être explicites. Les justificatifs doivent être substantiellement améliorés. La commission des lois présentera un amendement dans ce sens.
Quant à la structure du budget, on peut se demander s'il ne serait pas souhaitable de regrouper au sein de cette mission, pour une meilleure lisibilité, l'ensemble des crédits destinés à l'outre-mer ou, à tout le moins, de créer une mission interministérielle.
Je voudrais maintenant vous convier à faire avec moi un rapide tour du monde, non pas en quatre-vingts jours ni en quatre-vingts minutes, mais seulement pendant le temps de parole qui me reste.
Commençons par les départements et régions d'outre- mer. Ils consomment environ les trois quarts de l'effort global de l'État compte tenu de leur population. La Réunion reste le premier bénéficiaire avec 43 %, suivie de la Guadeloupe avec 27 %, de la Martinique avec 19 % et de la Guyane avec 11 %. Leur budget total progresse légèrement par rapport à 2006 avec une répartition relativement stable entre les différentes missions qui concourent à leur financement.
La décentralisation est en marche avec le vote par le Sénat des projets de loi organique et ordinaire sur les dispositions institutionnelles leur ouvrant la voie des habilitations dans le domaine de la loi et celle de la démocratie locale.
L'accession de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy au statut de collectivité d'outre-mer aura des répercussions sur la Guadeloupe qui demandera la compréhension de l'État. De même, ainsi que le Sénat l'a rappelé lors du débat sur les projets de lois précités, un effort financier de l'État sera nécessaire pour accompagner Saint-Martin dans son développement.
L'immigration clandestine est un grand sujet de préoccupation tout particulièrement en Guyane et en Guadeloupe, où Saint-Martin apparaît comme une porte grande ouverte compte tenu de sa frontière « libre » avec la partie néerlandaise de l'île.
On peut donc noter avec satisfaction l'accroissement prévu des moyens humains, matériels et juridiques dans ce secteur. N'oublions pas que la lutte contre l'immigration clandestine passe également par l'aide au développement des pays sources. Dans ce contexte, l'aide à la coopération régionale y compris pour les collectivités d'outre-mer mérite d'être encouragée. La commission des lois présentera un amendement à cet effet.
On assiste à une stabilisation de la délinquance dans les départements d'outre-mer - à l'exception de la Guyane, notamment en raison de cette pression migratoire illégale - et on note une amélioration de la situation carcérale par une baisse du nombre de détenus et l'aboutissement d'investissements en matière pénitentiaire. Trois projets sont bien avancés. Ils concernent la Guyane, la Martinique et la Réunion.
Poursuivons maintenant, mes chers collègues, notre voyage vers les collectivités d'outre-mer, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises.
Mayotte est en marche vers la départementalisation ainsi que la modernisation de son statut le prévoit. Toutefois, préalablement à ce « passage », la révision de l'état civil doit être menée à bien. Des moyens sont ainsi prévus dans le budget afin d'accélérer les travaux de la commission chargée de cette tâche immense et complexe, et nous nous en félicitons.
La lutte contre l'immigration clandestine fait également l'objet d'un effort tout particulier, Mayotte comme la Guyane et la Guadeloupe, est particulièrement touchée en la matière.
Enfin, on ne peut terminer cette brève visite à cette collectivité sans évoquer, monsieur le ministre, la nécessité de procéder à son désenclavement pour favoriser son développement économique ; cela soulève évidemment la question de l'aéroport et des liaisons avec la métropole.
Après la chaleur des Caraïbes et de l'océan Indien, rendons-nous un instant vers la fraîcheur de l'Atlantique nord où se trouve la plus petite collectivité d'outre-mer à savoir Saint-Pierre-et-Miquelon.
Son statut est en cours de modernisation grâce aux projets de loi organique et ordinaire en cours de discussion. Mais le problème central qu'il convient de résoudre est celui de son développement économique depuis la réduction drastique des quotas de pêche. Des efforts en matière d'aquaculture sont entrepris. L'exploitation des hydrocarbures à proximité de l'archipel ouvre de nouvelles perspectives qu'il serait utile de saisir le plus rapidement possible. Une coopération régionale étroite avec le Canada ne peut qu'être porteuse.
Revenons vers les régions chaudes de la planète en nous dirigeant cette fois vers le Pacifique et la Polynésie française.
Malgré une certaine stagnation du secteur touristique, on peut noter un redressement de la situation économique, notamment grâce à une forte croissance de la perliculture. La modernisation des communes poursuit son cours afin de leur permettre de devenir des collectivités de plein exercice. On peut s'en réjouir.
Comme dans le reste de l'outre-mer, on assiste globalement à une baisse de la délinquance, mais avec une relative augmentation des agressions de rue, qui donne un sentiment d'insécurité aux citoyens.
Les îles Wallis et Futuna restent la seule collectivité d'outre-mer à ne pas avoir de modernisation de statut effective ou en cours. Sa structure coutumière l'explique, mais il faudra bien dans un délai raisonnable, après les consultations et concertations nécessaires et au premier chef avec nos collègues parlementaires, mettre cette collectivité en conformité avec les nouvelles dispositions constitutionnelles en vue d'un développement aussi harmonieux que possible, bien entendu dans le respect des spécificités locales. Il y va de son intérêt comme de celui des citoyens. C'est d'autant plus nécessaire que l'aide de l'État est indispensable en raison de la faiblesse structurelle de l'activité économique.
En outre, avec Saint-Pierre-et-Miquelon, la collectivité des îles Wallis et Futuna peut s'enorgueillir du taux de délinquance le plus bas de la République française.
Restons dans le Pacifique pour une rapide incursion en Nouvelle-Calédonie. L'avenir du territoire repose sur le rééquilibrage économique entre le nord et le sud, le nickel restant au centre de ce développement.
Le projet d'usine du sud pour l'exploitation des latérites continue à progresser, malgré quelques difficultés en matière de garantie pour la protection de l'environnement d'autant plus sensibles que le classement du récif corallien au patrimoine mondial de l'humanité est largement souhaité.
Quant à l'usine du nord, absolument vitale pour ce rééquilibrage, elle est encore soumise aux aléas des offres publiques d'achat, les OPA, intervenues dans le secteur du nickel. Certes, des engagements ont été pris par le nouveau partenaire, mais il importe que les incertitudes soient rapidement levées. L'enjeu est trop important, monsieur le ministre, pour que l'État ne se montre pas d'une très grande vigilance.
En matière de délinquance, la situation est comparable à celle de la plupart des autres collectivités, c'est-à-dire, il faut le souligner, avec un taux inférieur à celui de la métropole, même s'il est encore trop élevé.
Quant à la situation carcérale qui était catastrophique, elle devrait rapidement s'améliorer avec les projets d'extension et de rénovation largement engagés.
Enfin, nous terminerons notre voyage avec les régions le plus froides de la République française, à savoir les Terres australes et antarctiques françaises.
Non seulement elles apportent une immense zone économique exclusive à notre pays dans l'océan Indien et les mers voisines, elles lui donnent le statut de l'un des cinq États possessionnés de l'Antarctique, mais elles lui offrent un extraordinaire laboratoire de recherche pour mieux connaître notre planète.
Une telle richesse pour la sauvegarde du monde de demain demande donc quelques efforts financiers pourtant bien modestes face aux défis de l'environnement. Nous pouvons donc nous féliciter de l'action de notre pays en ce domaine.
Avec ces remarques, la commission des lois vous recommande d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer ».