Il est beaucoup question, en effet, d'égalité. Mais vous êtes en train, mes chers collègues, d'oublier totalement l'exigence d'égalité de traitement des citoyens quel que soit le lieu où ils vivent ! Or la disposition proposée, qui amènerait les maires à décider de prendre telle ou telle sanction quand certaines incivilités auront été commises, ne me paraît absolument pas susceptible d'y satisfaire. Le problème est réel, car il n'entre pas dans le rôle, il n'est de la compétence d'un maire de prendre une décision de ce type !
En tant que maire - depuis maintenant un certain nombre d'années ! -, je suis bien souvent amenée à discuter avec ceux qui commettent des incivilités. Et je constate que, sur le fond, vous êtes en train, une fois de plus, de vous défausser de vos responsabilités sur les maires, alors que, avant de la supprimer purement et simplement, vous avez réduit les moyens dont disposait la police de proximité - et je parle bien de la police nationale - pour mener le travail de terrain, le travail de fond qu'elle pouvait réaliser dans ces occasions. J'ai encore à l'esprit la déclaration de Nicolas Sarkozy affirmant qu'il était inacceptable que des policiers se permettent d'aller disputer des matches de foot avec les jeunes d'un quartier, au motif que cela n'aurait pas été de leur responsabilité...
Notre conception de la police de proximité, en effet, n'est pas celle du gouvernement aujourd'hui en place. Nous trouvions très positive l'idée que la police nationale soit proche des habitants, ait avec eux une relation concrète, permanente, qui leur permette, le cas échéant, de confier leurs interrogations, leur difficulté à vivre y compris au policier de proximité, parce qu'il vit constamment à leurs côtés. On va très souvent chercher des exemples ailleurs : en Angleterre, les bobbies, d'une certaine façon, tiennent ce rôle, et ce n'est pas si inintéressant !
Vous êtes en train de faire en sorte qu'échoient aux élus locaux des responsabilités qui ne sont pas les leurs.
Quand nous débattions de la loi relative aux libertés et responsabilités locales, qui a été approuvée par votre majorité, vous affirmiez que la justice et la police étaient des attributions régaliennes de l'État ; aujourd'hui, vous voulez, d'une certaine manière, transférer aux collectivités territoriales une nouvelle compétence que vous n'avez pas voulu introduire dans cette loi relative aux libertés et responsabilités locales, parce que vous saviez que, sur le fond, elle ne pourrait pas recueillir l'accord des maires.
Quand vous prétendez que c'est pour protéger les plus faibles, soyons sérieux ! Ce dont les plus faibles ont besoin, c'est que vous nous donniez sur le terrain les moyens financiers afin que nous puissions réellement mettre en place tout le travail de prévention.
Vous réduisez aujourd'hui les moyens de la politique de la ville dans tous les contrats de ville, par exemple. Vous réduisez les moyens affectés à toutes les actions qui étaient menées sur le terrain et qui permettaient d'accompagner les populations les plus fragiles, en particulier les jeunes, sur le plan éducatif. C'est là que les vrais problèmes se posent.
Ce que les maires demandent, c'est d'avoir les moyens de mener des actions de prévention, et non pas de mener des actions qui relèvent de la justice.
Par ailleurs, je tiens à rappeler que si nous avons eu tant de difficultés à mettre en oeuvre les travaux d'intérêt général, c'est bien souvent parce que la protection judiciaire de la jeunesse a manqué elle aussi de moyens et de personnels pour nous accompagner dans ces démarches.
Dès lors, il faut cesser de vouloir faire porter la responsabilité au maire de la commune, responsabilité que l'État n'assume pas en ne donnant pas les moyens nécessaires aux différents secteurs qui devraient les avoir.