Intervention de Bernard Dussaut

Réunion du 13 juin 2005 à 15h00
Petites et moyennes entreprises — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Bernard DussautBernard Dussaut :

Vous nous présentez, monsieur le ministre, un texte qui, élaboré par votre prédécesseur, Christian Jacob, s'inscrit dans un contexte particulier. Il nous est soumis quelques jours après la déclaration de politique générale de M. le Premier ministre, qui l'a mis au coeur de son dispositif de lutte contre le chômage, en réservant aux petites et moyennes entreprises un statut bien à part, mais en ouvrant une large et discutable brèche dans le droit du travail.

Certaines dispositions de ce projet de loi étaient très attendues et l'on y relève des points positifs : l'obligation du statut du conjoint en est une illustration, la mobilisation en faveur de la transmission d'entreprise une autre. Il n'en demeure pas moins que l'on a beaucoup de mal à identifier clairement l'objet de ce texte. Le qualifier de « fourre-tout » serait presque désobligeant, tant les sujets qui y sont abordés sont importants.

Plusieurs des titres qui le composent auraient dû faire l'objet de projets de loi propres : les problématiques abordées y sont délicates et auront des conséquences importantes sur l'organisation économique et sociale de notre pays.

A cette difficulté multidimensionnelle s'ajoute le fait que ce projet de loi s'articule avec d'autres textes. Il est ainsi à mettre en relation directe avec le projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie, qui sera présenté dans quelques jours par Thierry Breton à l'Assemblée nationale, et avec le projet de loi relatif aux services à la personne que Jean-Louis Borloo proposera demain aux députés.

Enfin, le titre VI de ce texte est complémentaire de la proposition de loi d'Alain Fouché sur l'urbanisme commercial, qui va s'intercaler dans notre débat puisque son examen est inscrit à l'ordre du jour de jeudi prochain.

La méthode utilisée n'est pas nouvelle sous cette législature : on scinde les textes, on les recompose au gré de l'affichage en communication que l'on pourra en tirer. Les mesures phares sont comme des arbres qui cachent la forêt, permettant à la majorité d'avancer masquée vers plus de libéralisme et d'inégalité.

Nous abordons un texte essentiel pour l'organisation économique et sociale de notre pays dans les années à venir. Pourtant, le Gouvernement s'est résolu à déclarer l'urgence.

Le groupe socialiste dénonce vivement le recours à cette procédure d'urgence. Etant donné l'ampleur du champ économique et social qu'investit votre projet de loi, monsieur le ministre, nous aurions espéré disposer du temps de l'évaluation et de la réflexion nécessaires au travail parlementaire.

Mes chers collègues de la majorité parlementaire, vous allez porter une lourde responsabilité, car il n'y aura pas de nouvelle lecture au Sénat.

Composé pour la moitié d'articles comportant des mesures de soutien aux petites et moyennes entreprises, le projet de loi comprend, pour l'autre moitié, d'abord une réforme de la loi Galland qui risque d'engendrer un tel bouleversement des relations commerciales que nous redoutons des conséquences négatives sur l'ensemble du tissu des PME et des très petites entreprises, ensuite une réforme des chambres de commerce et d'industrie envisagée sans lien avec les chambres des métiers - qui sont pourtant les interlocutrices privilégiées de ces petites entreprises -, et enfin des dispositions qui ont un rapport encore plus lointain avec l'objet du texte puisqu'elles vont, en effet, des mesures relatives aux sociétés d'exercice libéral ou au travail illégal à des dispositions relatives au travail dans l'industrie cinématographique !

C'est un texte que notre rapporteur a qualifié dans son rapport de « protéiforme ». La formule est à retenir en ce sens qu'elle est plus élégante que « fourre-tout » ! A sa lecture, nous avons plus le sentiment de travailler sur un DDOEF - un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier - que sur un projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.

Les cinq premiers titres contiennent des mesures de soutien aux petites et moyennes entreprises. Les artisans, les commerçants, les petits entrepreneurs attendent, depuis la loi pour l'initiative économique, que la réalité du poids économique qu'ils représentent soit prise en compte. « Les enjeux, en termes d'activités économiques, d'emplois mais aussi d'équilibre des territoires, de transmission des savoirs... sont considérables », ainsi que le souligne un rapport de 2004 du Conseil économique et social sur la transmission des PME.

Au mois de mars 2002, François Patriat présentait à l'Assemblée nationale un projet de loi qui tenait compte de tout ce potentiel et proposait un dispositif cohérent pour la pérennité et le développement de ce secteur. Le thème central était clair : il s'agissait d'aider au développement, à la création et à la transmission des petites et très petites entreprises.

Vous avez repris, monsieur le ministre, dans la loi pour l'initiative économique, un certain nombre de dispositions du texte de François Patriat, notamment financières. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion