Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 13 juin 2005 à 15h00
Petites et moyennes entreprises — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que présente le Gouvernement nécessiterait sans doute une recherche en paternité. En effet, issu de la scission d'un texte initial, dit « Gaymard-Jacob », ensuite présenté en conseil des ministres par le seul Christian Jacob, il est aujourd'hui défendu par vous-même, monsieur le ministre. J'ai d'ailleurs lu dans une gazette que vous revendiquiez pour ce texte l'appellation « Dutreil II », en référence à la loi pour l'initiative économique votée en 2003. J'en reparlerai. Par ailleurs, nous attendons que nous soit soumis un texte « Breton », pour « la confiance et la modernisation de l'économie ».

Dans cet éparpillement législatif, nous avons bien du mal à discerner une ligne de force, une politique économique.

Il s'agit là, pour nous, d'un premier motif d'inquiétude. Ceux-ci sont au nombre de quatre.

Le projet de loi qui nous réunit aujourd'hui intervient après le changement de gouvernement et la déclaration de politique générale du Premier ministre. Celui-ci entend concentrer son action sur l'emploi, notamment dans les très petites entreprises, et étendre les contrats aidés - après les avoir refusés pendant trois ans ! Or il prévoit d'introduire plus de précarisation pour les salariés, avec le « contrat nouvelle embauche », sans être pour autant en mesure de nous dire si cette agression contre le code du travail aura un effet positif, eu égard à l'objectif proclamé, lequel est quantitativement flou, compte tenu, notamment, de la grande fluctuation des emplois dans les entreprises de moins de dix salariés.

Il n'est en effet pas fait allusion, ni dans ce texte ni dans aucune des velléités gouvernementales, au contexte économique et à l'atonie alarmante de la croissance. Or, nous le savons, en dessous de 2 % de croissance - les prévisionnistes hésitent entre 1, 5 % et 1, 7 % pour 2005 -, on ne crée pas d'emplois, ni dans les grandes ni dans les petites entreprises.

Si la croissance ne se décrète pas, elle s'organise. Vous ne l'avez pas organisée en 2004, vous ne le ferez pas en 2005, dans un contexte de ralentissement général.

Notre deuxième sujet d'inquiétude est l'absence de chiffrage de l'effet sur les finances publiques des quelques mesures que vous proposez, monsieur le ministre.

Les finances publiques vont en effet être très fortement mises à contribution en 2006, compte tenu des nombreuses exonérations et des dégrèvements prévus dans la loi de finances pour 2005, présentée, à l'époque, par M. Sarkozy. Je remercie d'ailleurs M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Cazalet, d'avoir fait l'effort d'en chiffrer le coût.

De plus, les dispositifs que vous proposez, monsieur le ministre, dans les articles 5, 6 et 8 du projet de loi sont sujets à caution. En effet, ils ne s'attaquent pas au coeur du problème, à savoir les besoins en financement des PME, qui sont confrontées à la frilosité de notre système bancaire et financier. Ces dispositifs contournent l'obstacle en exonérant les dons des droits de mutation et en supprimant la législation sur l'usure. Ainsi, avec l'article 5, vous créez une nouvelle niche fiscale, qui bénéficiera aux très petites entreprises les mieux dotées. Si les ministres changent, voire sont interchangeables, la philosophie demeure.

Notre troisième inquiétude est le silence assourdissant sur la mobilisation des leviers financiers pour aider les entreprises ou les commerces. Aucune allusion n'est faite au FISAC, le Fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales, ...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion