Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 13 novembre 2006 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Monsieur le président, mes chers collègues, à la fin d'une législature sonne toujours l'heure du bilan.

En cinq années de gestion du régime général par votre majorité, monsieur le ministre délégué, les déficits cumulés auront atteint 51 milliards d'euros, alors que, en 2001, sous la législature de Lionel Jospin, le régime général était excédentaire, pour la troisième année consécutive, comme l'a rappelé M. Fischer.

Aujourd'hui, le Gouvernement se réjouit d'un déficit de 9, 7 milliards d'euros pour l'année 2006 et annonce, avec fierté, que le déficit n'atteindra que 8 milliards d'euros en 2007.

Au regard de l'augmentation des prélèvements sociaux que supportent nos concitoyens, de l'ampleur de la dette comme de son report sur les générations futures, la satisfaction est pourtant loin d'être de mise !

Notre système est en crise, pris en tenaille entre, d'un côté, la hausse continue des dépenses liée au progrès technique de notre médecine, à l'accroissement et au vieillissement de la population, et, de l'autre, les difficultés de notre économie : croissance molle, chômage élevé, précarité accrue.

Aujourd'hui, et nous le constatons tous, alors que l'accès à des soins de qualité pour tous et sur tout le territoire est à la base de notre système d'assurance maladie, ce droit fondamental est remis en cause.

Les inégalités devant la maladie et la mort se creusent de nouveau, et ce sont la justice et la cohérence de notre pacte social qui sont ébranlées.

Dans ces conditions, la réduction annoncée du déficit de l'assurance maladie, passant de 8 milliards d'euros en 2005 à 6 milliards d'euros en 2006, ne saurait déclencher l'enthousiasme. Quant à la prévision d'un déficit pour 2007 n'excédant pas les 39 milliards d'euros, elle apparaît pour le moins optimiste, pour ne pas dire irréaliste.

En attendant, on est loin du retour à l'équilibre des comptes promis pour 2007 par M. Douste-Blazy, lors de l'adoption de la loi de financement de la sécurité sociale de 2004.

Et pourtant, à l'époque, l'engagement était tellement sûr que les reports sur la caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, s'arrêtent en 2006 et que rien n'est prévu aujourd'hui pour financer le déficit à partir de 2007.

Sur ce point, le Gouvernement n'a jamais répondu aux questions qui lui étaient posées. Certes, il est heureux que nous cessions de reporter sur les générations futures l'augmentation de nos dettes, mais ce n'est pas en faisant la politique de l'autruche que nous pourrons affronter la réalité de la situation actuelle.

Nous sommes autant que vous attachés à la bonne gestion de notre système social et nous nous serions sincèrement réjouis si la baisse des déficits était le résultat d'une vraie maîtrise médicalisée des dépenses, d'un apport de financement pérenne et de la mise en oeuvre d'une politique de santé publique adaptée aux défis de notre époque.

Mais force est de constater que cette baisse est largement fictive et que les prévisions sur lesquelles s'appuient les annonces pour 2007 sont au mieux optimistes, au pire délirantes.

La diminution du déficit affiché en 2006 résulte ainsi essentiellement de la hausse des prélèvements et de la diminution des remboursements. Ce sont les assurés sociaux qui en font les frais.

Dès 2005, cela s'est traduit par la mise en place de la franchise d'un euro sur les consultations et les actes médicaux, par la hausse du forfait hospitalier et par l'augmentation de la CSG et de la CRDS, contributions calculées sur 97 % des revenus, et non plus sur 95 %.

En 2006, les assurés sociaux ont à nouveau vu le forfait hospitalier augmenter d'un euro ; ils ont payé une franchise de dix-huit euros sur les actes lourds ; ils ont supporté la diminution du taux des indemnités journalières pour les arrêts de travail de plus de six mois, des remboursements moindres et la liberté tarifaire des spécialistes, s'ils n'avaient pas choisi et consulté leur médecin traitant.

Cette baisse du déficit est également due, en partie, au supplément de recettes apporté par l'anticipation de l'assujettissement aux prélèvements sociaux des intérêts des plans d'épargne logement détenus depuis dix ans, un tour de passe-passe bien pratique pour rendre un chiffre plus présentable, mais difficile à renouveler, en réalité, un pis-aller qui masque mal votre difficulté à trouver des ressources pérennes et solides.

L'année 2007 est une année d'élections, ce qui explique que le projet de loi de financement de la sécurité sociale se réduise à un empilement de mesurettes, sans plus de cohérence que d'ambition, ce qui explique surtout que les assurés sociaux, victimes principales de la politique de réduction des dépenses des années précédentes, soient épargnés pour cette année.

La réduction du déficit annoncé repose principalement sur les prévisions d'évolution de dépenses, donc sur l'ONDAM.

Or l'ONDAM n'est pas construit sur des données médicales, des évaluations rigoureuses et des contrats clairs et transparents entre l'État et les professionnels de santé. Il est déterminé de façon « pifométrique », en fonction des objectifs économiques de Bercy. C'est dire si le chiffre du déficit annoncé est crédible ! Même M. Vasselle, rapporteur, nous a fait part de ses doutes à ce sujet, pointant « un certain nombre d'insuffisances » dans les hypothèses formulées par le Gouvernement !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion