Avec 35 milliards d’euros de dépenses supplémentaires, le premier collectif budgétaire, qui nous a d’ailleurs été présenté quelques semaines après le projet de loi de finances initiale, a d’emblée donné le ton : la trajectoire budgétaire initialement prévue ne serait sciemment pas respectée...
Que peut-on finalement retenir de ce projet de loi de règlement des comptes et du rapport de gestion pour l’année 2010 ?
L’exécution budgétaire de l’année 2010 s’est achevée sur un déficit de l’État de 148, 8 milliards d’euros, accru de 10 milliards d’euros par rapport au niveau déjà exceptionnellement élevé de 2009 et supérieur de 31, 4 milliards d’euros au montant initialement prévu en loi de finances !
Rappelons que, depuis 2007, le déficit de l’État n’a pas diminué. Il s’est même accentué de 117, 4 milliards d’euros. Entre 2002 et 2010, il aura été multiplié par trois, pour représenter aujourd’hui près de la moitié des dépenses nettes du budget général !
La dette de l’État continue de se creuser, l’accumulation des déficits budgétaires successifs augmentant chaque jour un peu plus son coût.
Faut-il rappeler que 27 % des dépenses courantes de l’État, hors intérêt de la dette, ne sont pas financées par des ressources permanentes et doivent être couvertes par de nouveaux emprunts !
Côté recettes, « l’effritement du rendement de nos impôts » se ressent au niveau des recettes fiscales de 2010 : 171, 9 milliards d’euros, contre 232, 4 milliards d’euros en 2007. Quand allons-nous réformer l’ensemble de nos prélèvements et de leurs assiettes ? La question vient d’ailleurs d’être posée par notre collègue Thierry Foucaud.
À mon sens, une réforme équitable devra mieux prendre en compte le revenu réel dans les différents prélèvements fiscaux ; c’est un préalable au renouvellement de notre pacte républicain.
Je profite de notre discussion pour attirer votre attention sur une autre conséquence symptomatique : la dangereuse diminution, d’année en année, du taux de couverture des dépenses par les recettes : 85, 9 % en 2007, 79, 5 % en 2008, 55, 3 % en 2009, puis seulement 53, 3 % en 2010, ce qui correspond, en trois ans, à une baisse de 32, 6 points.
Côté dépenses, qu’en a-t-il été en 2010 ?
Les dépenses de l’État se sont fortement éloignées des prévisions votées en loi de finances initiale, notamment du fait des investissements d’avenir : 352, 5 milliards d’euros selon le Gouvernement, 355, 8 milliards d’euros selon la Cour des comptes. En réalité, elles sont plus élevées : il faut compter 3, 3 milliards d’euros supplémentaires !
En effet, le Gouvernement a exclu du champ de la norme, à hauteur de 3 milliards d’euros, plusieurs mesures budgétaires grâce à des mesures de transfert et de périmètre. Mais cette méthode de contournement n’a échappé à personne. La règle du « zéro volume » a donc été respectée, mais en apparence seulement...
Nous pouvons faire ce même diagnostic pour ce qui concerne la débudgétisation des dépenses d’investissement du grand emprunt. En effet, 35 milliards d’euros environ ont ainsi été sortis du périmètre de la norme. Monsieur le secrétaire d'État, quel suivi sera-t-il fait de ces dépenses dérogatoires ?
Tout cela semble bien étranger aux principes d’unité et d’universalité budgétaires.
La faiblesse des taux d’intérêt en 2010 a engendré un gain conjoncturel de 10 milliards d’euros, mais nombreux sont ceux qui restent perplexes quant à l’utilisation qui en a été faite. Ces « économies de constatation » étaient une bonne surprise. Pourquoi ne pas avoir affecté les sommes correspondantes à la résorption du déficit ? Vous avez fait le contraire et même pire, en les affectant à une dépense largement supérieure : 17 milliards de dépenses nouvelles, soit un dérapage de pas moins de 4, 3 milliards d’euros !
Dans ces conditions, que retiendra-t-on de l’exécution de l’exercice budgétaire 2010, qui parachève en quelque sorte l’actuel quinquennat ?
Que l’inflation est fortement repartie à la hausse, avec une augmentation de 1, 5 % en 2010, contre une baisse de 0, 2 % en 2009.
Que la progression du pouvoir d’achat des ménages s’est nettement ralentie : avec une croissance de 0, 8 % en 2010, contre 1, 3 % en 2009.
Que le taux de chômage est revenu à son niveau record de 1999 et demeure supérieur au niveau qui était le sien avant la crise économique. Tout récemment, les chiffres de l’INSEE nous ont encore fait l’effet d’une douche froide.
Pourtant, les décisions fiscales de ces dernières années avaient pourtant auguré du meilleur en matière d’emploi ! Souvenez-vous, vous deviez « libérer des gisements d’emploi », afin d’atteindre le plein emploi.