Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 25 octobre 2005 à 16h00
Traitement de la récidive des infractions pénales — Discussion générale

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Il peut même arriver que la première condamnation, si elle n'a pas d'incidence légale sur la mesure de la peine, empêche le juge d'assortir la peine prononcée pour la seconde infraction du bénéfice du sursis simple à l'exécution. En effet, l'article 132-30 du code pénal prévoit que le juge ne peut décider qu'il sera sursis à l'exécution de la peine qu'il prononce si le prévenu a déjà été condamné dans les cinq ans précédant les faits à une peine d'emprisonnement.

Vous pouvez donc constater que le code pénal n'est pas spécialement laxiste en cas de pluralité d'infractions. A quoi sert donc l'introduction de la réitération aujourd'hui dans le code pénal ? Je voudrais bien le savoir !

Par ailleurs, les diverses mesures d'allongement des peines de sûreté nous éloignent d'un principe fondamental de notre droit pénal - à savoir l'individualisation des peines - et nous rapprochent des peines automatiques, ou peines plancher, véritable dérive à l'américaine dont on connaît les effets en matière de prévention : je vous invite à regarder de près la justice américaine !

Les conditions actuelles de la détention offrent une illustration de tout ce qui contribue à rendre impossible la réinsertion, la prise en charge réelle des personnes, et donc à fabriquer de la récidive.

S'agissant des dispositions de la proposition de loi concernant les mineurs, elles sont honteuses ! Encore une fois, la spécificité de la justice des mineurs est mise en cause, insidieusement, en contradiction avec nos principes constitutionnels et nos engagements internationaux.

Quant au placement des mineurs en centre éducatif fermé, la solution existe déjà ! Que voulez-vous prouver en l'introduisant dans le présent texte ? J'ose espérer que, au moins sur ce point, concernant les mineurs, la sagesse l'emportera !

Au surplus, les députés ont restreint les conditions d'application de la loi de 2002 sur les droits des malades, qui permet de suspendre la peine des détenus dont le pronostic vital est atteint ou dont l'état de santé est incompatible avec le maintien en détention. Chacun peut le vérifier, cette loi est appliquée de façon très restrictive, et presque exclusivement pour des malades en fin de vie : jusqu'à présent, seul Maurice Papon se porte encore aujourd'hui très bien après avoir été libéré !

Les conditions qui ont été ajoutées par l'Assemblée nationale - avec votre bénédiction, monsieur le garde des sceaux -, à savoir le trouble exceptionnel à l'ordre public ou le risque particulièrement élevé de récidive, sont de nature à détruire le sens de la loi « Kouchner » et à jeter le doute sur la crédibilité des experts médicaux et des juges. J'ose espérer que la sagesse l'emportera sur ce point également !

Enfin, le battage médiatique autour du bracelet électronique GPS ne fait pas avancer, hélas ! le débat sur la lutte contre la récidive. Laisser croire à l'opinion publique que ce dispositif est la panacée, alors que l'expérimentation en est si limitée, relève de la pure démagogie. Il serait d'ailleurs intéressant de savoir pourquoi si peu de personnes sont placées sous bracelet électronique fixe à l'heure actuelle.

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