Intervention de Alain Fouché

Réunion du 25 octobre 2005 à 16h00
Traitement de la récidive des infractions pénales — Discussion générale

Photo de Alain FouchéAlain Fouché :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme tout le monde a pu le constater, la question de la récidive a pris une dimension tragique lors de récentes affaires, et l'opinion publique, à juste titre, s'est étonnée de l'incapacité de l'appareil juridique à protéger la société et les victimes.

Dans ce domaine, les statistiques sont révélatrices. Avec 31 % de récidivistes, qui peut nier l'impérieuse nécessité de traiter le phénomène ? Il ne faut pas perdre de vue, en particulier, que les infractions sexuelles ont subi un accroissement considérable depuis vingt ans : les condamnations criminelles ont augmenté de 200 %, les condamnations correctionnelles de 250 %.

Ainsi, un pourcentage important de détenus sont des délinquants sexuels et plus de cinq mille condamnés aujourd'hui incarcérés sont des violeurs. Sans suivi adapté, nous le savons tous, certains d'entre eux sont de vrais « dangers à retardement », car ils ont de fortes chances de récidiver.

A ce titre, le texte qui nous est soumis est équilibré et illustre notre volonté de protéger la société tout en assurant la réinsertion de ceux qui ont purgé leur peine.

Monsieur le ministre, au cours de cette deuxième lecture, cet équilibre doit incontestablement être maintenu. A cet égard, je voudrais saluer le travail du rapporteur de la commission des lois, notre collègue François Zocchetto.

Personne ne pourra le rappeler mieux que vous, monsieur le ministre, cette proposition de loi est le fruit d'une réflexion approfondie, fondée sur un diagnostic solide et incontesté, dont l'Assemblée nationale et vous-même, alors président de sa commission des lois, ont eu l'initiative.

Au centre du dispositif de lutte contre la récidive était envisagé le bracelet électronique, qui fait beaucoup parler aujourd'hui, dans sa version mobile. Et c'est sur la base du rapport de la mission confiée par le Premier ministre de l'époque, M. Raffarin, à notre collègue député Georges Fenech que nous pouvons aujourd'hui adopter le placement sous surveillance électronique mobile à titre de mesure de sûreté.

Certaines questions liées notamment aux modalités du placement sous surveillance électronique mobile font encore débat. Malgré tout, je suis certain que notre assemblée trouvera la solution la plus appropriée au regard, en particulier, de la protection des victimes, qui doit toujours rester au coeur de nos préoccupations.

C'est ce qui me conduit à concentrer mon propos sur deux points qui me paraissent essentiels en matière de récidive : l'érosion des peines, et la protection de notre société contre les criminels « les plus dangereux des dangereux », si je peux m'exprimer ainsi.

S'agissant des peines, notre pays a aboli la peine de mort - c'était une grande mesure - et l'a remplacée par la réclusion ou la détention criminelle à perpétuité. Or il ne s'agit que d'une perpétuité de principe, ce qui nourrit l'incompréhension et, parfois même, l'exaspération de l'opinion.

En fait, par le jeu de la grâce, des réductions de peine et de la libération conditionnelle, il n'existe pas d'enfermement définitif. Ainsi, depuis de nombreuses années, on a pu recenser une quinzaine de criminels qui, condamnés soit à mort soit à perpétuité mais ultérieurement libérés, ont commis de nouveaux meurtres. Et je ne parle pas de tous ceux, malheureusement plus nombreux, qui, après avoir été d'abord condamnés à des peines à temps puis libérés, ont récidivé en commettant des crimes.

Devant cette situation, certains se sont préoccupés de réintroduire une perpétuité réelle à l'encontre de certains types de criminels dont le passé rendait la récidive hautement probable.

Cette réforme a été réalisée par la loi Méhaignerie du 1er février 1994, mais cette dernière ne concernait qu'une hypothèse très particulière de crime atroce, à savoir le meurtre d'un mineur de quinze ans accompagné de viol ou d'actes de torture. Dans ce cas, une disposition de l'article 720-4 du code de procédure pénale permet de porter la période de sûreté à trente ans, au lieu des dix-huit ou vingt-deux ans habituellement infligés en matière de réclusion criminelle à perpétuité.

Par conséquent, monsieur le ministre, je souhaiterais, que vous puissiez nous indiquer le bilan de l'application de cette loi et, plus particulièrement, nous préciser s'il ne vous paraîtrait pas souhaitable d'étendre la perpétuité réelle à d'autres types de criminels.

Bien évidemment, se pose alors la seconde question : que faire des récidivistes particulièrement dangereux ?

Une mesure de sûreté devant être adaptée à la personnalité et à la dangerosité de l'individu qui en fait l'objet, la commission Burgelin a, à ce titre, envisagé la création de nouveaux établissements, qui pourraient être dénommés « centres fermés de protection sociale ».

Ni hôpitaux ni prisons, ces établissements seraient des lieux d'hébergement fermés et sécurisés, dotés d'équipes spécialisées dans la prise en charge des individus qui, bien qu'ayant purgé leur peine, demeurent dangereux pour autrui.

En la matière, je souhaiterais donc savoir si la France compte à l'avenir s'inspirer - et, si oui, de quelle manière - des expériences allemande et néerlandaise, lesquelles n'ont jamais été jugées contraires à la Convention européenne des droits de l'homme.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion