Quelles leçons devons-nous tirer de cette situation ?
Première leçon : il faut retrouver des marges de manoeuvre.
A l'évidence, nous devons réduire nos déficits, et personne ne le conteste. Comment y parvenir ? Personne ne peut raisonnablement proposer une hausse des impôts. Résumons : tout le monde est d'accord pour réduire les déficits et tout le monde est d'accord pour ne pas augmenter les impôts. Point n'est besoin d'être prix Nobel d'économie pour se rendre compte qu'il ne reste qu'une seule piste : la maîtrise des dépenses.
C'est la raison pour laquelle, depuis trois ans, le Gouvernement propose de ne pas augmenter les dépenses. Cette année, la croissance devrait s'élever à 2, 5 %. Dès lors, si l'on maintient les dépenses à leur niveau actuel, en vérité, on les réduit de 2, 5 % par rapport à l'évolution du produit intérieur brut.
C'est pourquoi nous devons respecter nos engagements budgétaires.
Naturellement, poser la question de la réduction des dépenses, c'est poser la question des effectifs dans la fonction publique. Les salaires et les pensions représentent en effet 40 % du budget de l'Etat. S'interdire de toucher à ce poste, c'est faire porter l'ensemble des économies sur les 60 % qui restent.
Lorsque l'Etat engage un fonctionnaire, il ne l'engage pas pour sa seule durée de vie professionnelle, c'est-à-dire sur quarante ans ; il l'engage pour toute sa vie, puisque les retraites sont payées sur le budget de la nation.
La question du non-remplacement des effectifs qui partent à la retraite se pose clairement. J'aurai l'occasion d'en parler longuement lors de la présentation du projet de budget pour 2005.
Il ne faut pas oublier que les prélèvements de l'Etat ne représentent plus aujourd'hui que 38 % des prélèvements totaux, contre 50 % pour les prélèvements des administrations de sécurité sociale et 12 % pour les prélèvements des collectivités locales. Par conséquent, vouloir faire peser la politique de baisse des impôts sur les seuls 38 % ne me semblerait pas raisonnable.
Il ne faut pas oublier non plus que le taux des prélèvements au bénéfice de l'Etat est à la baisse depuis des années.
La tendance lourde, nous le savons, c'est la hausse des prélèvements sociaux, car: la santé coûte de plus en plus cher et nous vivons de plus en plus vieux. Il n'est pas un pays au monde qui ne soit confronté à ce problème.
Lorsqu'on interroge les Français pour savoir si l'on doit diminuer la protection en matière de santé, leur réponse devrait éviter à qui que ce soit de poser la question.
Et comme il existe des raisons objectives à l'augmentation des dépenses sociales, c'est une raison supplémentaire pour maîtriser nos dépenses sociales, afin qu'il n'y ait pas de gabegie. Le ministre de la santé évoquera sans doute ce point.
Au-delà, nous devons réfléchir, compte tenu justement du poids des prélèvements sociaux et de leur impact sur l'emploi, au financement de notre protection sociale.
Est-il raisonnable d'ajuster indéfiniment les recettes aux dépenses ? Non, et ce n'est pas être libéral que de l'affirmer. Je ne suis pas en train de dire - et Philippe Douste-Blazy le sait bien - qu'il faut diminuer la protection sociale. Mais si, pour la financer, on doit augmenter les cotisations et si, du fait de cette augmentation, le nombre d'emplois diminue, en définitive, s'agit-il véritablement d'une protection sociale ? On peut protéger ceux qui travaillent, mais si, à l'arrivée, il y a moins d'emplois, que préservera-t-on et, surtout, comment financera-t-on ?